Page:Aimard - La Grande flibuste, 1862.djvu/74

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

gnez rien, mon ami, je tomberai noblement et en homme de cœur.

— J’en suis persuadé, mon ami ; je n’ai plus que quelques mots à vous dire. Moi aussi j’ai été Dauph’yers, je le suis encore ; c’est grâce à mes frères que j’ai conquis la fortune que je possède. Prenez ce portefeuille, mettez à votre cou cette chaînette à laquelle pend un médaillon ; puis, quand vous serez seul, vous lirez les instructions contenues dans le portefeuille et vous agirez comme elles vous enseigneront de le faire. Si vous les suivez de point en point, je vous garantis le succès : voilà le cadeau que je vous réservais et que je ne voulais vous donner que lorsque nous serions seuls.

— Oh ! mon Dieu ! s’écria le comte avec effusion.

— Nous voici à la barrière, dit le baron en arrêtant la voiture ; séparons-nous. Adieu, mon ami, courage et volonté ! Embrassez-moi. Surtout souvenez-vous du portefeuille et du médaillon.

Les deux hommes restèrent longtemps serrés dans les bras l’un de l’autre ; enfin le baron se dégagea par un vigoureux effort, ouvrît la portière et sauta sur le trottoir.

— Adieu, cria-t-il une dernière fois, adieu, Gaétan ! souvenez-vous !

La chaise de poste s’était élancée à fond de train sur la grand’route.

Chose étrange, les deux hommes murmurèrent le même mot en secouant la tête avec découragement dès qu’ils se trouvèrent seuls, l’un marchant à grands pas sur le trottoir, l’autre affaissé sur les coussins de la voiture.

Ce mot était :