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de reconnaître qu’il venait de faire une route longue et surtout pénible.

À son arrivée, l’Ours-Noir lui avait jeté un long regard, puis il s’était remis à fumer sans lui adresser la parole, l’étiquette indienne exigeant que le sachem n’interroge pas un autre chef avant que celui-ci ait secoué dans le foyer les cendres de son calumet.

L’impatience de l’Ours-Noir était évidemment partagée par les autres Indiens. Cependant tous restaient graves et silencieux ; enfin le nouveau-venu aspira une dernière bouffée de fumée qu’il rendit par la bouche et les narines, puis il repassa son calumet à sa ceinture.

L’Ours-Noir se tourna vers lui.

— La Petite-Panthère a bien tardé, dit-il.

Ceci n’était pas une interrogation ; l’Indien se borna à s’incliner sans répondre.

— Les vautours planent en grandes troupes au-dessus des déserts, reprit le chef au bout d’un instant, les coyotes aiguisent leurs crocs aigus, les Apaches sentent une odeur de sang qui fait bondir de joie leurs cœurs dans leurs poitrines ; mon fils n’a-t-il rien vu ?

— La Petite-Panthère est un guerrier renommé dans sa tribu ; aux premières feuilles ce sera un chef ; il a rempli la mission que lui avait confiée son père.

— Ooch ! que font les Longs-Couteaux ?

— Les Longs-Couteaux sont des chiens qui hurlent sans savoir mordre ; un guerrier apache leur fait peur.

Les chefs sourirent avec orgueil à cette fanfaronnade, qu’ils prirent naïvement au sérieux.

— La Petite-Panthère a vu leur camp, reprit l’Indien, il les a comptés ; ils pleurent comme des