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lui, le front rougissant et la tête basse ; qu’est-ce que cela signifie ? quelle faute avez-vous donc commise ?

— Une faute dont je suis seul coupable, don Sylva, et dont seul je dois porter le châtiment ; je vous ai indignement trompé, c’est moi qui ai enlevé votre fille !

— Vous ! s’écria l’haciendero avec un éclair de fureur ; ainsi j’ai été votre jouet, votre dupe !

— La passion ne raisonne pas ; je ne dirai qu’un mot pour ma défense : j’aime votre fille ! Hélas ! don Sylva, je reconnais maintenant combien j’ai été coupable ; la réflexion, bien que tardive, est venue enfin, et comme doña Anita qui pleure à vos pieds, je m’humilie devant vous, et je vous crie : Pardonnez-moi !

— Pardon, mon père ! dit faiblement la jeune fille.

L’haciendero fit un geste.

— Oh ! reprit vivement le Tigrero, soyez généreux, don Sylva ; ne nous repoussez pas ! Notre repentir est vrai, il est sincère. J’ai à cœur de réparer le mal que j’ai fait ; j’étais fou alors, la passion m’aveuglait ; ne m’accablez pas.

— Mon père, continua doña Anita d’une voix pleine de larmes, je l’aime ! Cependant, lorsque nous avons quitté la colonie, nous aurions pu fuir, vous abandonner ; nous ne l’avons pas voulu, la pensée ne nous en est pas venue un instant ; nous avons eu honte de notre faute. Nous voici tous deux prêts à vous obéir et à exécuter sans murmurer les ordres qu’il vous plaira de nous donner ; ne soyez pas inflexible, mon père, pardonnez-nous !