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conversations, tant la mémoire du peu de bien qu’on leur a fait est demeurée gravée dans le cœur de ces hommes primitifs.

Don Sylva de Torrès voulait regagner le plus tôt possible, et par la voie la plus directe, la colonie de Guetzalli ; malheureusement, il lui fallait traverser, pour ainsi dire à vol d’oiseau, une étendue considérable de terrains où aucune route n’était tracée ; de plus, à cause de son ignorance topographique de la prairie, il était contraint de se fier à don Martial, guide fort bon sous tous les rapports, dont il ne mettait nullement en doute la sagacité et les connaissances approfondies du désert, mais auquel, sans se rendre précisément compte de la raison qui le poussait, il n’accordait qu’une médiocre confiance.

Cependant, le Tigrero, en apparence du moins, faisait preuve du plus grand dévoûment pour l’haciendero, le conduisant par les sentes les plus battues, lui faisant éviter les passages difficiles et veillant avec un soin et une sollicitude sans égale à la sûreté de la petite troupe.

Chaque soir, au coucher du soleil, la caravane campait au sommet d’un monticule découvert d’où la vue portait de tous les côtés à une grande distance, afin d’éviter les surprises.

Le soir du quatrième jour, après une marche fatigante sur un sol convulsionné, ils atteignirent une colline où don Martial proposa de camper.

L’haciendero accepta cette demande avec d’autant plus de plaisir, que, peu habitué à voyager de cette façon, il éprouvait une lassitude extrême. Après un repas frugal, composé de tortillas de maïs et de frijoles saupoudrés de piments enragés et arrosés de