Page:Aimard - La Grande flibuste, 1862.djvu/309

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

comme celui-là, où les routes n’existent pas, quinze lieues sont presque infranchissables pour un homme qui n’est pas rompu à la vie du désert et accoutumé à en supporter les fatigues. Don Sylva, bien que n’ayant jamais voyagé que dans d’excellentes conditions, c’est-à-dire avec tout le comfort qu’il est possible de se procurer dans ces régions éloignées, savait, du moins par théorie, sinon par pratique, toutes les difficultés qui, à chaque pas, surgiraient devant lui, et combien d’empêchements viendraient entraver sa marche. Sa résolution fut prise presque immédiatement.

Don Sylva, ainsi que bon nombre de ses compatriotes, était doué d’un entêtement rare : lorsqu’il avait formé un projet ou arrêté quoique ce fût dans sa tête, plus les obstacles qui s’opposaient à l’exécution de ce projet étaient grands, plus il y tenait, plus il brûlait de le mener à bonne fin.

— Écoutez, dit-il à don Martial, je veux être franc avec vous : je ne vous apprends rien de nouveau, n’est-ce pas, en vous annonçant le mariage de ma fille avec le comte de Lhorailles ? Il faut que ce mariage s’accomplisse, je l’ai juré, et cela sera, quoi qu’on dise et quoi qu’on fasse pour l’empêcher. Maintenant, je vais mettre à l’épreuve le dévoûment dont vous vous vantez envers moi.

— Parlez, señor.

— Vous allez envoyer votre compagnon au comte de Lhorailles ; il lui portera un mot qui calmera son inquiétude et lui annoncera ma prochaine arrivée.

— Bien.

— Le ferez-vous ?

— À l’instant.