Page:Aimard - La Grande flibuste, 1862.djvu/216

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

tuelles des Indiens ; nous sommes à la lune des Comanches, ne le savez-vous pas ?

— Permettez : je ne suis pas un coureur des bois, moi ; je vous avoue que tout cela m’effraie extrêmement, et que je donnerais quelque chose de grand cœur pour en être hors.

Le lepero fit un geste.

— Vous êtes un enfant, reprit en riant don Martial ; il est évident que ce sont les Indiens qui, pour dissimuler leur nombre, ont incendié la prairie ; ils viennent derrière le feu, bientôt vous entendrez résonner leur cri de guerre au milieu des tourbillons de flamme et de fumée qui s’approchent incessamment et ne tarderont pas à vous envelopper de toutes parts. En demeurant ici vous courez trois risques inévitables : être rôti, scalpé ou tué, choses fort peu gracieuses et qui, je n’en doute pas, vous sourient médiocrement. Croyez-moi, venez avec moi ; si vous êtes tué, eh bien, que voulez-vous, c’est une chance à courir. Voyons, descendez-vous ? le feu nous gagne ; bientôt il ne sera plus temps. Que faites-vous ?

— Je vous suis, répondit le lepero d’une voix dolente ; il le faut bien ! J’étais fou, le diable m’emporte, de quitter Guaymas où j’étais si heureux, où je vivais à ne rien faire, pour venir me fourrer dans de pareils guêpiers. Je vous affirme bien, par exemple, que si j’en réchappe, celui qui m’y reprendra sera bien fin.

— Bah ! bah ! on dit toujours cela ; hâtons-nous, le temps presse.

En effet, le désert, dans un espace de plusieurs lieues, brûlait comme le cratère d’un volcan im-