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L’ÉCLAIREUR.

nous le trouverons ; seulement je ne réponds pas qu’il sera bon.

Il y eut un assez long silence. Bon-Affût était atterré de la résolution de don Miguel, résolution qu’il savait devoir être immuable ; il calculait dans son esprit les chances bonnes ou mauvaises qu’offrait pour la réussite de ses projets l’arrivée si malencontreuse du jeune homme. Enfin il reprit la parole.

— Je n’essaierai pas, dit-il à don Miguel, de chercher plus longtemps à vous dissuader de tenter de voir les jeunes filles ; je vous connais assez pour savoir que ce serait inutile et que mes raisonnements n’aboutiraient peut-être qu’à vous entraîner à faire quelque irrémédiable folie ; je me charge, moi de vous introduire auprès de doña Laura.

— Vous me le promettez ! s’écria vivement le jeune homme.

— Oui, mais à une condition.

— Parlez, quelle qu’elle soit je l’accepte.

— Bien ; lorsque le moment sera venu, je vous la ferai connaître ; seulement, croyez-moi, priez l’Aigle-Volant de compléter votre déguisement ; de la façon dont vous et Balle-Franche êtes attifés en ce moment, vous ne feriez point un pas dans la ville sans être reconnus. Maintenant je vous quitte, voici le jour, je dois me rendre auprès du grand-prêtre ; je vous laisse à la garde de l’Aigle-Volant ; suivez bien ses instructions : il y va de la vie, non-seulement pour vous, mais encore pour celles que vous voulez sauver.

Le jeune homme tressaillit douloureusement.

— Je vous obéirai, répondit-il ; mais vous tiendrez votre promesse.

— Je la tiendrai aujourd’hui même.

Après avoir pendant quelques instants parlé à voix basse avec l’Aigle-Volant, Bon-Affût laissa les trois hommes dans le temple et sortit.