Page:Aimard - L’Éclaireur, 1860.djvu/378

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
368
L’ÉCLAIREUR.

laquelle il n’y avait aucune trace de l’émotion intérieure qui l’agitait :

— Mon père m’aime ; ce qu’il a fait est bien, et je l’en remercie.

L’amantzin s’inclina avec déférence en touchant légèrement du bout de ses doigts maigres la main qui lui était tendue.

— Le Wacondah m’a inspiré, répondit-il d’une voix hypocrite.

— Que le saint nom du Wacondah soit béni, fit le chef. Mon père ne me laissera-t-il pas voir mes prisonnières ?

— Je le voudrais ; malheureusement cela est impossible.

— Comment ! s’écria le jeune homme avec une nuance d’impatience qu’il ne put complètement dissimuler.

— La loi est positive : l’entrée du palais des vierges du Soleil est interdite aux hommes.

— C’est vrai ; mais ces jeunes filles ne font pas partie des vierges du Soleil ; ce sont des femmes des visages pâles que j’ai amenées ici.

— Je le sais, ce que dit mon fils est juste.

— Eh bien, mon père le voit, rien ne s’oppose à ce que mes prisonnières me soient rendues.

— Mon fils se trompe ; leur présence parmi les vierges du Soleil les a malgré elles placées sous le coup de la loi. Forcé par des circonstances impérieuses, je n’ai pas, dans le premier moment, réfléchi à cela lorsque je les ai fait entrer dans le palais. Je voulais, pour me conformer aux recommandations de mon fils, les sauver à tout prix. Maintenant je regrette ce que j’ai fait, mais il est trop tard.

Addick éprouva une tentation énorme de briser avec son casse-tête le crâne du misérable jongleur qui se moquait aussi effrontément de lui avec son accent hypocrite et son air doucereux ; mais, heureusement pour le devin et pro-