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L’ÉCLAIREUR.

sait là pour aller recommencer un peu plus loin le même manège avec d’autres.

Bon-Affût était demeuré dehors près de trois heures : lorsqu’il rentra au calli, Atoyac et l’Aigle-Volant n’étaient pas encore de retour ; seulement les deux femmes, accroupies sur des nattes, causaient entre elles avec une certaine animation.

En l’apercevant, l’Églantine lui jeta un regard d’intelligence.

Le chasseur se laissa tomber sur une butacca, détacha le calumet passé à sa ceinture, l’alluma et se mit à fumer.

Cependant, après avoir échangé avec le soi-disant médecin une salutation muette, les deux femmes avaient repris leur conversation.

— Ainsi, dit l’Églantine, les prisonniers faits sur les visages pâles sont amenés ici.

— Oui, répondit le Pigeon.

— Cela m’étonne, continua la jeune femme ; car il suffirait que l’un d’eux parvînt à s’échapper pour que le secret de la situation exacte de la ville fût révélé aux Gachupines, et alors on ne tarderait pas à les voir apparaître dans la plaine.

— C’est vrai ; mais ma sœur ignore que l’on ne s’échappe pas de Quiepaa-Tani.

L’Églantine hocha la tête d’un air de doute.

— Och ! fit-elle, les blancs sont bien rusés : il est certain, cependant, que les deux jeunes filles pâles que nous venons de voir ne s’échapperont pas, elles sont trop bien gardées pour cela ; je ne sais pourquoi j’éprouve pour elles une si grande pitié.

— La même chose m’arrive. Pauvres enfants ! si jeunes, si douces, si jolies, séparées à jamais de tous ceux qui leur sont chers ! leur sort est affreux !

— Oh ! bien affreux ! Mais qu’y faire ? elles appartiennent