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L’ÉCLAIREUR.

la jeune femme du regard, jusqu’à ce qu’enfin elle eut disparu au milieu des arbres.

Comme rien ne les pressait en ce moment, les aventuriers laissèrent passer la grande chaleur du jour, et ils ne se remirent en route que lorsque le soleil à son déclin n’apparut plus que comme un globe de feu presque au niveau du sol. Leur marche fut lente à cause des difficultés sans nombre qu’ils avaient à surmonter pour se frayer une route à travers le fouillis de lianes et de plantes de toutes sortes enchevêtrées les unes dans les autres en réseaux inextricables qu’il leur fallait couper à coups de hache à chaque pas.

Enfin, après quatre jours d’une course pendant laquelle ils avaient eu à supporter des fatigues inouïes, ils virent enfin devant eux les arbres devenir plus clairsemés, le couvert se fit moins épais, et entre les arbres ils aperçurent au loin un horizon profond et découvert.

Bien que les aventuriers se trouvassent au sein d’une forêt vierge où, selon toutes probabilités, ils ne devaient s’attendre à rencontrer aucun individu de leur espèce, cependant ils ne négligeaient aucune précaution et n’avançaient qu’avec prudence, marchant en file indienne, le doigt sur la détente du rifle, l’œil et l’oreille au guet ; car aussi près d’une des villes sacrées des Indiens, ils pouvaient s’attendre, surtout après la chaude escarmouche qu’ils avaient eue à soutenir quelques jours auparavant, à être espionnés par des éclaireurs envoyés à leur recherche.

Vers le soir du quatrième jour, au moment où ils se préparaient à camper pour la nuit dans une clairière assez vaste sur les bords d’un ruisseau sans nom, comme on en rencontre tant dans les forêts vierges, Bon-Affût, qui marchait en tête de la petite troupe, s’arrêta tout à coup et se baissa vivement sur le sol en donnant les marques du plus grand étonnement.