Page:Aimard - L’Éclaireur, 1860.djvu/165

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
155
L’ÉCLAIREUR.

depuis longtemps déjà, Bon-Affût m’a souvent parlé de vous.

— Depuis trente ans lui et moi nous sommes liés.

— Je le sais ; mais où est-il donc, que je ne le vois pas ?

— Il est parti, voilà deux heures environ, pour se rendre au campement de votre cuadrilla, afin d’amener des secours.

— Il songe à tout.

— Moi, je suis demeuré pour vous soigner et veiller sur vous pendant son absence, mais il ne peut tarder à revenir.

— Croyez-vous que je serai longtemps réduit à l’impuissance ?

— Non, vos blessures ne sont pas sérieuses. Ce qui vous abat en ce moment, c’est le choc moral que vous avez reçu, et surtout le sang que vous avez perdu lorsque vous avez roulé évanoui dans le Rubio.

— Ainsi cette rivière…

— Est le Rubio.

— Je suis donc à l’endroit même où s’est terminée la lutte ?

— Oui.

— Combien de jours pensez-vous que je demeure ainsi ?

— Quatre ou cinq au plus.

Il y eut encore quelques secondes d’interruption à cette conversation à bâtons rompus.

— Vous m’avez dit que ce qui m’abat le plus est l’affaiblissement de mes facultés produit par le choc moral que j’ai reçu, n’est-ce pas ? reprit don Miguel.

— Oui, je l’ai dit.

— Croyez-vous qu’une volonté ferme et puissante pourrait amener une réaction favorable a cet état ?

— Je le crois.