Page:Aimard - L’Éclaireur, 1860.djvu/146

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
136
L’ÉCLAIREUR.

Mais la nature humaine a des bornes qu’elle ne peut dépasser. Ce dernier effort acheva d’éteindre le peu de forces qui lui restaient, et, serrant avec la frénésie du désespoir la bride de son cheval, il roula dans le fleuve et s’évanouit en murmurant d’une voix éteinte :

— Laura ! Laura !

Deux coups de feu se croisèrent au-dessus de sa tête, l’un tiré par l’homme qui, de la rive, le couchait en joue l’autre par Bon-Affût. L’inconnu poussa un hurlement de bête fauve, s’affaissa en tournoyant comme un homme ivre et disparut.

Qui était cet homme ? Était-il mort ou seulement blessé ?



XIV.

Les Voyageurs.


Les événements que nous avons entrepris de raconter sont tellement mêlés d’incidents enchevêtrés les uns dans les autres par cette implacable fatalité du hasard qui domine la vie humaine, que nous sommes contraint, à notre grand regret, d’interrompre encore une fois notre récit, pour faire assister le lecteur à une scène qui se passait non loin du gué del Rubio le jour même où s’accomplissaient les faits que nous avons rapportés dans nos précédents chapitres.

Environ vers une heure de la tarde, c’est-à-dire au moment où les rayons du soleil, parvenu à son zénith, font peser sur la Prairie une chaleur si intense, que tout ce qui vit et qui respire cherche un refuge au plus