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L’ÉCLAIREUR.

Une dizaine de cavaliers mexicains parurent.

— Voilà du renfort au cas où vos guerriers ne suffiraient pas, fit-il en se tournant ver le chef.

Celui-ci dissimula un mouvement de mauvaise humeur et répondit, en haussant les épaules avec dédain :

— À quoi bon vingt guerriers sur un homme seul !

— C’est que cet homme en vaut cent ! répondit don Stefano avec un ton de conviction qui donna à réfléchir au chef.

Ils partirent.

Cependant don Miguel galopait toujours ; il était loin pourtant de se douter du complot qui, en ce moment, se tramait contre lui ; et, s’il hâtait sa marche, ce n’était nullement par appréhension, mais parce que le vent, dont la violence croissait de minute en minute, et les larges gouttes de pluie qui commençaient à tomber, l’avertissaient de chercher un abri au plus vite. Tout en galopant, il réfléchissait au court entretien qu’il avait eu avec le guerrier peau-rouge ; en repassant dans son esprit les paroles qui avaient été échangées entre eux, il sentait une inquiétude vague, une crainte secrète, se glisser dans son cœur, sans qu’il lui fut possible de se rendre bien clairement compte de l’émotion qu’il éprouvait ; il lui semblait entrevoir une trahison derrière les réticences étudiées du chef ; il se rappelait maintenant que parfois celui-ci avait paru gêné en lui parlant. Tremblant alors qu’un malheur ne fut arrivé aux jeunes filles ou qu’un péril les menaçât, il sentit augmenter son inquiétude, d’autant plus qu’il ne savait quel moyen employer pour s’assurer de la fidélité de l’homme qu’il soupçonnait d’une perfidie.

Tout à coup un éclair éblouissant traversa la nue, son cheval fit un brusque écart de côté et deux ou trois balles sifflèrent auprès de lui.

Le jeune homme se redressa sur sa selle. Il se trouvait au