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été patients devant l’insulte, soyons magnanimes après la victoire ! Ce n’est pas nous qui avons désiré la guerre ; on nous l’a imposée, nous la subissons ; mais souvenons-nous que nous combattons pour la liberté d’un peuple, et que nos ennemis d’aujourd’hui seront nos frères demain ; soyons terribles pendant le combat, doux après la bataille. Un dernier mot, ou plutôt une dernière prière : laissez aux Mexicains le responsabilité du premier feu, pour qu’il soit bien constaté que jusqu’au dernier moment nous avons voulu la paix. Maintenant, frères, vive la France !

— Vive la France ! s’écrièrent les aventuriers en brandissant leurs armes.

— Chacun à son poste de combat ! commanda le comte.

Le mouvement s’exécuta avec un ensemble merveilleux.

Don Luis tira sa montre : il était dix heures. Alors il dégaina son sabre, le brandit autour de sa tête, et se tournant vers la compagnie, dont tous les hommes avaient les yeux fixés sur lui :

— En avant ! cria-t-il d’une voix vibrante.

— En avant ! répétèrent les officiers.

La colonne s’ébranla en bon ordre, marchant l’arme au bras, au pas accéléré.

Nous avons parlé du pont qui seul donnait accès dans la ville ; ce pont était barricadé ; à sa tête se trouvait une maison bourrée de soldats depuis les caves jusqu’à l'asotea.

Un silence de mort pesait sur la campagne ; les Français marchaient froidement, comme à la parade, la tête droite et l’œil assuré.