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s’apprécient à leur juste valeur, répondit sèchement Valentin. Je ne suis ni un niais ni un individu infatué de son propre mérite, la franchise seule, une franchise réciproque, pourra donc seule, je le répète, nous amener à nous entendre, si cela est possible, ce dont je doute.

— Que supposez-vous donc, monsieur ?

— Je ne suppose rien, général, je suis certain de ce que j’avance, voilà tout. Quelle probabilité qu’un grand personnage comme vous, général, gouverneur de la Sonora, que sais-je encore ? s’abaisse à solliciter d’un pauvre diable de chasseur comme je le suis une entrevue la nuit, au fond d’un désert, s’il n’espère pas retirer de cette entrevue de grands avantages ? Il faudrait être fou ou imbécile pour ne pas voir cela du premier coup d’œil, et, grâce à Dieu, je ne suis ni l’un ni l’autre.

— Supposons que cela soit ainsi que vous le dites.

— Supposons, je ne demande pas mieux. Maintenant, venons au fait.

— Hum ! cela ne me semble guère facile avec vous.

— Pourquoi donc ? Nos premières relations, que vous rappeliez tout à l’heure, ont dû cependant vous prouver que je suis assez facile en affaires.

— C’est juste ; pourtant celle que j’ai à vous proposer est assez scabreuse et je crains…

— Quoi donc ? Que je refuse ? Dame ! vous comprenez, c’est un risque à courir.

— Non, je crains que vous ne saisissiez pas bien l’esprit de l’affaire et que vous vous fâchiez.

— Vous croyez ? après tout c’est possible. Voulez-vous que je vous évite la peine de vous expliquer ?