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— Vous voyez, général, observa le missionnaire, que je ne m’étais pas trompé sur le caractère de M. le comte.

— Doña Angela est venue seule, poussée par sa propre volonté, dans mon camp ; elle est respectée et traitée avec tous les égards qu’elle mérite. Doña Angela est libre de ses actions, que je ne me reconnais en aucune façon le droit d’influencer. Comme je ne l’ai pas enlevée à son père, que je n’ai rien fait pour l’attirer ici, je ne puis la rendre, ainsi que monsieur semble vouloir l’exiger. Si doña Angela veut retourner parmi les siens, nul ne s’y opposera ; mais si, au contraire, elle préfère rester ici sous la protection de mes braves compagnons et la mienne, aucun pouvoir humain ne parviendra à me l’enlever.

Ces paroles furent prononcées d’un ton péremptoire qui produisit une certaine impression sur les deux auditeurs.

— Du reste, messieurs, ce que nous disons entre nous, continua le comte, n’a aucune valeur tant que doña Angela ne se sera pas prononcée elle-même pour l’un ou l’autre parti. Je vais avoir l’honneur de vous conduire devant elle, vous vous expliquerez en sa présence, elle vous fera connaître sa volonté. Seulement, j’ai l’honneur de vous avertir que, quelle que soit cette volonté, vous et moi nous serons tenus de nous y soumettre.

— Soit, monsieur, répondit sèchement le général ; aussi bien peut-être vaut-il mieux qu’il en soit ainsi.

— Venez donc, reprit le comte.

Et il les précéda dans la cabane qui servait d’habitation particulière à la jeune fille.