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IX

Doña Angela.

Avant de rapporter ce qui se passa à Guetzalli, entre de Laville et le colonel, il nous faut revenir au camp des aventuriers.

Louis, tenant toujours la jeune fille pressée contre sa poitrine, l’avait transportée dans l’intérieur de la hutte en feuillage que ses compagnons lui avaient élevée à l’entrée de l’église.

Arrivé là, il la déposa sur une butacca — fauteuil, — et lui-même se laissa tomber sur un equipal — tabouret. Il y eut un long silence.

Tous deux réfléchissaient profondément.

Un étrange phénomène se passait dans le cœur de Louis.

Malgré lui il sentait l’espérance rentrer dans son âme, il respirait la vie par tous les pores, l’envie de vivre lui revenait ; il songeait à l’avenir, l’avenir qu’il avait voulu anéantir en lui, en choisissant pour suicide la folle et téméraire expédition à la tête de laquelle il s’était placé.

Le cœur de l’homme est un composé de contrastes extraordinaires : le comte s’était drapé dans sa douleur, il l’avait pour ainsi dire arrangée dans son esprit, vivant avec elle et par elle, s’en faisant à ses propres yeux une excuse pour justifier la ligne de conduite qu’il s’était tracée, ou plutôt que son frère de lait lui avait fait adopter, ne voulant et n’acceptant