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Le veuvage de vos maris
Et pleurez pour moy qui ne puis
Pleurer autant que j’ay d’ennuis !
Pleurez, o rochers, mes douleurs
De vos argentines fonteines
Pour moy qui souffre plus de peines
Que je ne puis trouver de pleurs,
Pour moy douloureux qui ne puis
Plorer aultant que j’ay d’ennuis !


X.

Que je sorte du creux
Du labirinte noir par le fil qui a prise
Ma chere liberté de l’or de ses cheveux,
Ou, si je pers la vie ainsi que la franchise,
Je perde tout par eux.
De ma douce prison,
Des ameres douleurs de mes pressantes gennes,
Des doux liens de ma serve raison,
Je couppe de sanglotz, parcelles de mes peines,
Ma funebre oraison.
Je ne meurs pas à tort,
Bien coupable du fait, coupable du martire,
Du feu d’amour & d’un torment plus fort,
Mais las ! donne, Deesse, à l’amant qui souspire
Ou la grace ou la mort.
Si j’ay grace de toy,
Je recoy’ ma raison de qui me l’a ravye,
Si ton courroux vient foudroier sur moy,
Tu me feras injuste en m’arrachant la vye,
Martire de ma foy.
O bienheureux souspirs,
Si de ses yeux si doux vous tirez recompence,