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142 LE PRIMTEMS DU SIEUR D'AUBIGNE.

Le dormir revenu presse

Mes yeux pesans de paresse,
Les pique & ferme à demy,
Et la main esvanouie
Du cousin est endormie
Dessus son luth endormy.
XII.

Au temps que la feile blesme

Pourrist languissante à bas,
J’allois esgarant mes pas
Pensif, honteux de moy mesme,
Pressant du pois de mon chef
Mon menton sur ma poitrine,
Comme abatu de ruine
Ou d’un horrible meschef.

Après, je haussois ma veuë,

Voiant, ce qui me deplaist,
Gemir la triste foreft
Qui languissoit toute nue,
Veufve de tant de beautez
Que les venteuses tempestes
Briserent depuis les festes
Jusqu’aux piedz acraventez

Où sont ces chesnes superbes.

Ces grands cedres hault montez
Quy pourrissent leurs beautez
Parmy les petites herbes ?
Où est ce riche ornement,
Où sont ces espais ombrages
Qui n’ont sçeu porter les rages
D’un automne seulement ?