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est pas de même à l’égard des glaciers. Ici tout est en quelque sorte primitif, car par eux-mêmes les glaciers ne favorisent point le développement des êtres organisés, à l’exception de quelques plantes et de quelques animalcules microscopiques, qui forment ce que l’on appelle vulgairement la neige rouge.

La neige rouge ne fait pas proprement partie de la glace des glaciers : c’est un corps étranger qui se développe à sa surface, et qui, scientifiquement parlant, n’a pas plus de rapport avec le massif des glaces que les plantes et les animaux n’en ont avec les couches minérales de la terre. Mais comme, de tout temps, les naturalistes ont signalé ce phénomène comme l’un des plus curieux que présentent les glaciers, je vais entrer dans quelques détails à cet égard.

Saussure[1] est à ma connaissance le premier qui ait signalé la neige rouge dans les Alpes : il en recueillit à plusieurs reprises sur le Mont-Bréven et sur le St-Bernard, et les expériences auxquelles il la soumit le conduisirent à penser que ce pourrait bien être une matière végétale, et vraisemblablement une poussière d’étamine. Il observe qu’elle ne se voit nulle part à une hauteur de plus de 1 440 toises au-dessus de la mer, et qu’elle n’existe qu’au milieu de grands espaces couverts de neige, et dans une certaine période de la fonte des neiges.

  1. De Saussure Voyages dans les Alpes, § 646 et § 2116