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vous disent en vous faisant voir une tache de neige isolée à une grande hauteur : ce sera l’année prochaine une glacière. Cependant ce cas n’en est pas moins fort rare, et il ne se présente jamais que dans les régions très-voisines des hauts névés. L’opinion de Saussure à cet égard me paraît assez juste, quoiqu’il ne l’appuie d’aucun exemple. Voici ce qu’on lit au § 540 de ses voyages dans les Alpes : « Si, à la fin d’un hiver abondant en neiges, une grande avalanche s’arrête dans un endroit que sa hauteur ou sa situation tient à l’abri des vents du midi et de l’ardeur du soleil, et que l’été suivant ne soit pas bien chaud, toute cette neige n’aura pas le temps de se fondre ; sa partie inférieure, imbibée d’eau, se convertira en glace ; l’on verra des neiges permanentes et même des glaces dans un endroit où il n’y en avait point auparavant. L’hiver suivant, de nouvelles neiges s’arrêteront dans cette même place, et leur masse augmentée résistera encore mieux que la première fois aux chaleurs de l’été. Si donc on a quelques étés consécutifs qui ne soient pas bien chauds, et qui succèdent à des hivers abondans en neiges, il se formera des glaciers dans des places où l’on ne se souvenait pas d’en avoir vu. »

J’ai vu de petits glaciers de cette sorte sur le flanc septentrional du Mont-Cervin, à une hauteur d’environ 8 000 pieds ; tandis qu’au dessus il y avait une grande tache de névé très-grenu, dont la surface était