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Les créoles n’ont pu voir, sans une extrême jalousie, un état de prospérité qui blesse autant leurs intérêts que leurs préjugés ; et, pour l’arrêter, ils ont employé toute leur influence auprès des gouverneurs successifs de la colonie.

Tel était l’état des esprits, lorsqu’au mois de décembre 1823, une brochure de trente-deux pages d’impression, intitulée, De la situation des gens de couleur libres aux Antilles françaises, fut introduite, on ne sait par qui, dans la colonie.

Cette brochure, imprimée à Paris chez Maccarthy, déposée à la Direction de la librairie le 20 octobre 1823, distribuée aux membres des deux chambres, aux ministres de V. M., n’a été l’objet d’aucune poursuite, d’aucune censure ; l’auteur en est connu, et il n’en décline pas la responsabilité.

Rédigée dans des termes mesurés et respectueux envers V. M. et son gouvernement, elle ne fait connaître qu’imparfaitement les vices de la législation locale ; et quant aux faits qu’elle signale, elle est restée bien loin de la vérité.

Les blancs ayant eu connaissance de l’arrivée de cette brochure, dénoncèrent son introduction aux autorités administratives et judiciaires comme une conspiration.

Si cette brochure eût été criminelle, la seule chose à faire était d’en ordonner la saisie, de la déférer aux tribunaux, et de la faire condamner comme séditieuse ; l’absence de l’auteur n’était pas un obstacle.

Une fois condamnée et supprimée, il eût été légal et régulier d’en poursuivre les distributeurs ; jusque-là, la réception et la distribution de cet écrit, était un fait innocent qu’aucune loi ne pouvait atteindre, ainsi qu’on le démontrera bientôt ; mais on voulait une conspiration.

Voici en quels termes cette dénonciation clandestine fut faite, et l’on jugera par le ton menaçant qui y règne, qui, des dénonciateurs ou des victimes, a