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gueurs qui ne doivent atteindre que des coupables, également reconnus tels, c’est ce qui est intolérable sous le gouvernement des Bourbons.

Il faut bien, pourtant, que les agens supérieurs du pouvoir public, quels qu’ils soient, se persuadent enfin, que non-seulement la Charte textuellement parlant, mais encore l’esprit de la Charte, doit dominer et régler tous leurs actes.

Et qu’on n’allègue pas le prétexte trop banal, de la différence réclamée dans l’usage du pouvoir entre la métropole et les colonies. Oui sans doute, les colonies ont et doivent avoir, sous plusieurs rapports, un régime particulier. Ainsi le veut la nature même des choses. Mais dans les colonies comme dans la métropole, le droit d’infliger des peines, pour crimes ou délits, comme de reconnaître et proclamer l’existence de ces délits ou de ces crimes, n’appartient qu’à l’autorité judiciaire ; et ce droit de punir, on voit que, dans l’espèce, la cour royale de la Martinique l’a exercé envers d’autres individus que les consultans. — La loi le lui donnait ; elle a pu en user. S’il est vrai, comme on l’assure dans le mémoire au roi, qu’elle ait violé les formes, renouvelé la doctrine des suspects, commis des excès de pouvoir, la cour de cassation doit être saisie de la connaissance de son arrêt, tout est dans l’ordre. S’il est vrai encore que le greffier, que le procureur général, lui-même ayant refusé de recevoir le pourvoi, l’arrêt ait eu toute son exécution dans la colonie, notamment, (ce qui fait frémir) par la peine de la marque, imprimée provisoirement à trois des condamnés, une responsabilité terrible pèse sur les coupables d’un pareil mépris de la loi et de l’humanité.

Mais la loi ne le conférait pas au gouverneur de la colonie, ce même droit de punir. Il a donc commis à l’égard des consultans, l’abus d’autorité dont ils souffrent et se plaignent, dont ils souffrent avec injustice, dont ils ne se seront pas plaints vainement : car, dans les colonies comme dans la métropole, ce