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LIBERTE, LIBRE ARBITRE

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II. Décisions et déclarations de l’Eglise relative au libre arbitre. — Deux sortes d’hérésies se sont élevées eontre le libre arbitre : les unes l’exaltaient au nom du naturalisme, les autres le déprimaient au nom du fatalisme ou du quiélisme. Aux unes et aux autres, rEy : lise a opposé, au cours des siècles, de multiples né}^ : ations.

Le pétagianisme est le type des hérésies naturalistes, exaltant outre mesure le libre arbitre. Pelage niait la déchéance originelle et affirmait la suffisance de la nature pour l’accomplissement intégral des comuiandemcnts divins. Les conciles de Milève (416) et de Carlhage (418) rétablirent la doctrine catholique, can. (5.7. 8, D.B.jio/i (68) ; 107(71) ; 108(72) ; le pape S. Zosimb y ajouta sa sanction. A son tour, le pape S. Célkstin, rééditant les enseignements de S. Innocent et de S. Zosime, affirma la nécessité de la grâce divine pour i-endre au libre arbitre sa vigueur, atteinte par le péché (43 1). De gratia indiciilus, notanmient c. 4. 7- 8. 10. 12, D. B., 130 (88) ; 133 (91) ; ’34 (9-2) ; 136(94) ; i 4’(96). Contre une forme plus subtile de la même erreur, le second concile d’Orange (5^9) affirma, non plus seulement l’insuffisance delà naturepour accomplir toutela loi divine, mais son impuissance radicale pour toute initiative quelle qu’elle soit, dans l’ordre du salut. Notamment can. i. 8. 9. 13. ai. 23. 25, D. B., I74(144) ; 181 (15 i) ; i 82 (152) ; .8fi (156) ; 194(164) ; 196 (iGG) ; 198 (168) ; 200 (169). La sanction de Boniface III donna à ces enseignements pleine autorité dans l’Eglise. Au Moyen âge, le III" concile de Valence (855), à l’occasion des erreurs prédestinatiennes, s’établissait expressément sur le terrain des conciles d’Afrique et d’Orange, can. 6, D. B., 325 (288). Parmi les erreurs d’ABÉLAno, le concile de Sens (II 40) notait un retour au pélagianisnie, n. 6, D. B., 378 (315). Les débuts du protestantisme furent aussi marqués par une nouvelle renaissance pélagienne autour de Zwingle ; le concile de Trente en prit occasion d’exposer et de préciser, dans sa sixième session (13 janvier 1047), la doctrine traditionnelle sur la justilication, qui est essentiellement l’œuvre de la grâce divine, avec le concours du libre arbitre. Voir surtout ch. i. 3. 5. 6. ii.D. B., 793 (e75) ; 795 (677) ; 797 (679) ; 798 (680) ; 804 (686). et can. i. 3, D. B., 81 1 (G93) ; 813 (696). Le naturalisme moderne, exaltant indiscrètement l’initiative et l’autonomie de l’homme, présente, dans quel(iues-unes de ses manifestations, une réelle affinité avec d’anciennes erreurs sur le libre arbitre. Ainsi Vamérlcanisine, préconisant l’exercice des vertus naturelles et spécialement des vertus dites actives, au détriment des vertus chrétiennes, méconnaissait la faiblesse et l’indigence de l’homme déchu. Cette apothéose du libre arbitre a encouru les condamnations de Lko.nXIII, Ep. Testent henevolentiae, 2 janv. 1899, 0. B., 1971 ; 1972, et de Pie, Encycl. Pascendi, 7 sept. 1907, D. B., 2104.

Les erreurs commises au préjudice du libre arbitre sont plus variées que celles commises à son avantage ; elles ont donné lieu à des condamnations plus nombreuses.

Au VIII » et au ix* siècle, le prédestinatianisme sévit en Espagne et en Krance. Dans une lettre aux évêqiies espagnols (785), le pajie Haduikn I* délimite le champ de la prédestination divine : Dieu a préparé lis mérites des justes et leur récompense ; il n’a point préparé les démérites des pécheurs, mais il les a prévus et, en conséquence de ces démérites, il leur a préparé des supplices éternels. D. B., 300 (a51). Les conciles de Chiersy (853). contre Gottes-CHALK, et de Valence (855), contre Jean Scot Eki-GÈ. xB, reprennent et précisent cette doctrine. Chiersy, can. I. 2.3. 4, D. B., 316(279) ; 317 (280) ; 318 (281) ; Sig

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(282) ; Valence, can. 2. 3. D. B., 821 (284) ; 322 (280). Le breuvage du salut est préparé à tous ; à chacun de le boire, et c’est l’œuvre du libre arbitre. Saint Léon IX rappelle la même vérité dans son symbole de foi (io53), D. B., 348 (296).

Le concile de Vienne (1311-1312) s’éleva contre la chimère quiétiste des Béguards, qui prétendaient que l’homme peut parvenir en cette vie à une complète iuipeocabilité. D. B., 471 S(|q. (399 sqq). Le concile de Constance (14l5), puis Mauti.n V (1418) condamnèrent, entre les erreurs de Wiclbfp, le fatalisme absolu ; n. 27, D. B., 607 (503).

Luther ayant insiste sur la déchéance du libre arbitre jusqu’à fermer le ciel aux âmes de bonne volonté, LÉON X réprouva ces doctrines désolantes. Bulle Exsurge Domine (b iuin 1620), n. 3. 36, D. B., 743 (627) ; 776 (660). Le concile de Trente, dans son décret sur le péché originel, spécifla que la concupiscence, à laquelle l’Apùlre donne parfois le nom de péché (Rom., iv, 12 sqq.), n’est pas, selon l’enseignement de l’Eglise, un péché proprement dit, mais seulement un fruit du péché et un poids qui incline l’homme au péché. Sess. v (17 juin 1546), c. 5, D. B., 792 (674). Dans son décret sur la justilication, le Concile revint sur cette matière, pour alhrmer que le libre arbitre, encore qu’atteint et affaibli par le péché, n’est pas frappé à mort. Sess. vi (13 janv. 1547), c. i, D. B., 793 (O7.5). Contre la théorie de la justilication définitive par la foi seule, il maintint le rôle essentiel du libre arbitre dans la justification du pécheur, où Dieu exige sa coopération, can. 4. 9, I). B., 814 (696) ; 819 (701), et son infirmité native qui l’expose à pécher encore, can. 23, D. B., 833 ("15).

La doctrine luthérienne du serf arbitre avait poussé des racines jusque dans le sol catholique : on la retrouve au fond des propositions de Baïus sur la corruption foncière de la naiure et la nécessité universelle de la grâce. Sous prétexte de s’opposer au pélagianisme, Baïus damnait le libre arbitre, dont il ne conservait le nom que jiour l’assujettir en fait à la nécessité inéluctable de pécher en tout ses actes. S. Pie V réprouva le système (1067). Voir notamment prop. 8. 25. 27. 28. 30. 35. 36. 87. 39. 40. 4 i. 50. 51. 59. 65. 66. 67. 76 ; cf. D. B., looi à 1080 (881 à 960).

Mais l’antithèse de la grâce omnipotente avec la nature pécheresse, âme du système baianiste, devait se survivre dans le /aHse » ; i’me. Les cinqpropositions extraites de VAugustitiiis et condamnées par Innocent X (3 1 mai i 653) en sont pleines. Voir proj). 2. 3. 4, D. B., 1093 (967)^094 (968). Il en est de même de plusieur propositions condamnées par Alexandre Vlll (7 déc. 1690), notamment I. 2. G 8, D. B., 1291 (II 58) ; 1292 (1109) ; 1296 (11 63) ; 1298(1165). Sous une forme plus atténuée, Qoesnel professe encore la stérilité complète de la nature, l’activité exclusive et irrésistible de la grâce. Parmi les propositions notées dans la bulle Unigenitus de Clément XI (8 sept. 1 713), voir i. a. 3. 4- 9- 10. ii. 17. ai. 2a. 23. 36. 87. 38. 64. 69, cf. D. B., 1351 à1451 (1216 à 1316). Le synode janséniste de Pistoie y revint encore ; dans la bulle Auclorem fidei (28 août i 794). Pie Vlalïirme une fois de plus que l’homme a le pouvoir de résister à la grâce intérieure du Christ, prop. 21, D. B., 1521 (138’i) ; il réprouve expressément la doctrine du double amour dominant et irrésistible, qui ne laisse pas (le milieu entre l’opération divine de la grâce et l’opération damnable de la nature, aS. 24, D. B., 1523(1386) ; 1524 (1287).

Beaucoup ])lus rares sont les traces de l’erreur quictist<>^ condamnée par Innocent X en la personne deMicnEL de Molinos(19 nov. 1687), voir prop. Sa. 55.56. 62, D. B., laai à 1288 (1088 à 1155).

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