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JUIFS ET CHRÉTIENS

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§ II. Les actbs

Dans celle période, les docunienls sont rares. Des renseignements, non pas complets, mais ])réc.ieux, sont fournis par les Actes des apùlres, qiieliiues actes des martyrs, et les Pères, surtout saint Justin, Dialogue tifec le juif Tryphon.

5. Les Juifs persécutent les chrétiens clans la Judée.

— Condamne par le sanhédrin, Jésus-Christ ji été exécuté jfràce à la complaisance de Pilate. T. Uei-NAcii, l ! eue critique, Paris, 1898, t. I, p. 153-iy4, dit ([ue la grande iniquilé judiciaire n’a pas été celle qui l’ut commise contre Jésus, mais celle dont sont victiuics les Juifs quand on les rend responsables du cruciliemenl, alors que Jésus s’esl voué à la mort par son langage et que les bourreaux et les juges furent les Romains, tandis que les Juifs ne furent que les « dénonciateurs et accusateurs ». Des dénonciateurs et accusateurs tels que les Juifs, dans les conditions où ils le furent, endossent justement la responsabilité principale.

Les disciples sont traités comme le Maître. Saint Justin’, Dial., xvi, xcxv, cxxxiii, atlirme que, si les Juifs n’ont plus le pouvoir de porter la main sur les chrétiens, ’à cause de ceux qui gouvernent, chaque fois qu’ils l’ont pu ou le peuvent, ils les ont tués ou les tuent. Les apôtres avaient été emprisonnes, flagellés, menacés de mort. La menace fut suivie d’effet pour saint Etienne, les Juifs profitant de la situation all’aiblie du gouverneur romain Maroellus. Des hommes et des femmes furent traînés en prison sur l’ordre des princes des prêtres, et l’émoi fut tel que les fidèles se dispersèrent dans la Judée et la Saniarie. De 4’à 4’i, les procurateurs de Judée sont remplacés par le roi Hérode Agrippa, qui fait décapiter saint Jacques le majeur, et, riVc/fs {/nia placeret Judæis, apposuil ut apprehenderet et Petrum, Act., xii, 3. A maintes reprises, les Juifs complotent la mort de Paul. En 62, sont lapidés Jacques, frère du Seigneur, et plusieurs chrétiens. En 117, saint Siméon, évéque de Jérusalem, subit le martyre. Le pseudo-messie Bar-Kokebas s’acharne contre les chrétiens et les massacre, à moins qu’ils ne renient et blasphèment le Christ, dit saint Justin, I’Apol., xxxi. L’anonyme, qui a écrit Contre les Catapliryi ; iens et dont EusiiBE nous a conservé un fragment, //. / ;., V, xvi, raconte que les femmes qui manifestaient l’intention de se convertir étaient flagellées ou lapidées.

Des textes de peu de valeur nous parlent encore de quatre martyrs, dont les noms sont inscrits au martyrologe romain : ce sont les saints Timon, l’un des sept premiers diacres, à Corinthe (tg avril), Joseph le juste(20juillet), Cléophas, disciple duChrist, à Emmaiis (26 septembre), et sainte Matrone, à’l’hessalonique (15 mars).

6. /.es Juifs demandent à l’autorité civile de persécuter les chrétiens. — De même qu’ils l’ont fait sur Pilate, ils pèsent sur les détenteurs de l’autorité romaine — les Actes nomment Félix et Faustus. procurateurs de la Judée, et Gallion, proconsul de l’Achaie — et, eux, les vaincus de Rome, au nom des intérêts de Rome ils réclament le châtiment des chrétiens : hi oinnes contra décréta Cuesaris faciunt^ regem alium dicentes esse Jesum, Act., xvu. 7.

Une occasion s’olTritde désigner les chrétiens aux rigueurs impériales. A la suite de l’incendie de Rome (6’i). Néron rejeta sur les chrétiens la responsabilité de l’événement. Pourquoi les chrétiens seuls, et non les Juifs ? Jusque là, Juifs et chrétiens étaient confondus par le pouvoir. Comment la confusion cessa-t-elle ? D’après Rknan, /.’Antéchrist. 1’é<lit., Paris, 1873, p. 15C-iGi, il est vraiseuiblable que ce fut par une intervention des Juifs qui avaient leurs

entrées secrètes chez Néron, spécialeuient de Poppée, femme de Néron, une demi-juive, une prosélyte au sens large du mot, qui exervait sur Néron une influence scmveraine. Un passage de saint Cliîment, 1° ad Cor., v-vi, corrobore cette hypothèse. Il met en garde les lidèles de Corinthe contre la « jalousie » qui a valu aux saints apôtres Pierre et Paul tant de vexations et Unalcment le martyre, et beaucoup d’outrages et de tortures à une grande foule d’élus qui sont venus s’adjoindre aux deux apôtres elqui ont laissé parmi nous un magnilique exemple ». Evidemnu ! ut il s’agit des martyrs de la persécution néronienne. La même jalousie », la même animosité ou haine, ; ^^ç, qui a poursuivi saint Pierre et saint Paul, est cause de la persécution qui les a fauchés. Ce ne peut être qu’une animosité entre membres d’une famille commune, c’est la « jalousie >. des Juifs.

7. /es Juifs applaudissent et concourent au.r persécutions. — Eu 155, à Smj’rne, le a3 février, jour de « grand sabbat », les Juifs sont mêlés à la foule quiréclamedessupplices|)oursaintPolycari)e.quand il est condamné au feu, la populace <()url chercher duboisetdes fagots ; « selon leur habitude, c’étaient les Juifs qui montraient le plus d’ardeur à cette besogne ». Polycarpe étant mort, les chrétiens se préparent à recueillir ses restes ; les Juifs s’y opposent, et telle est leur turbulence que le centurion eft’rayé ordonne de replacer le cadavre sur le bûcher. Martyriuin s. l’olycnrpi, xii, xni, xvir, xviii. A Smyrne encore, en 260, au jour anniversaire du martyre de Polycarpe, saint Pionius et ses compagnons, Sabine et Asclépiade, comparaissent devant le juge. Les Juifs et les Juives sont venus en grand nombre. Ils insultent les chrétiens qui refusent d’apostasier :

« Ces gens-là ont trop duré », s’éerient-ils ; ils rient

de ceux qui sacrilient. Ce qui leur vaut une brûlante invective de Pionius : « Nous sommes ennemis, soit, mais nous sommes des hommes malgré tout. En quoi avez-vous à vous plaindre de nous ? Avons-nous harcelé de noire haine quelqu’un des vôtres ? En avons-nous, avec une avidité de bête féroce, contraint un seul à sacrifier ? » l’assio s. l’ionii, tn-iv, xni-xiv. Au moment où l’on veut forcer, à Hérælée, saint Philippe et son diacre Hermès à sacrilier aux idoles (304), dans les yeux d’une partie de l’assistance on lit la pitié, dans ceux des autres une joie cruelle ; les Juifs sonl parmi les plus violents, l’assio s. l’hilippi //eracleensis, vi.

Les actes de saint Ponce de Cimiez(261) et ceux de sainte Marciane de Césarée, en Mauritanie (303), nous montrent également les Juifs excitant les païens contre les uuu’tyrs. Ces actes sont de valeur moindre que les |)récédcnts ; E. Lk Blant, Les actes des martyrs, supplément aux Acta sincera de Ihiinart, Paris, 1882, p. 82, estime que ceux de Ponce méritent quelque créance, et Tillbmont, Mémoires pour servir à l’histoire ecclésiastique, Paris, iGg8, t. V, p. a63, en dit autant de ceux de Marciane.

8. /es Juifs suscitent les persécutions par leurs calomnies. — Il semble bien r|ue ce sont les Juifs qui colportent, « commis-voyageurs de la calomnie », dit Rknan, Marc-.4urèle et la fin du monde antique, 3’= édit., Paris, 1882, p. 60, les accusations diverses qui amenèrent les persécutions contre les chrétiens, et qu’ainsi la responsabilité des persécutions leur incombe dans une large mesure. Saint Justin l’affirme, /)ial., XVII, cf. X, cviii, cxvii. Tertullikn le Tétk.e, Apol., yii ; Ad nation., , xiv : Quod enim aliud gênas seminarium est infamiæ ? Adv..Marcion., III, XXIII ; Scorp., x : Synagogas Judæorum fontes persecutionum, dit-il. A son tour, Obiokne, C. Cels., VI, xxvii, rappelle comme un fait certain l’origine juive