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ISLAMISME ET SES SECTES

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l’islam est donc coiislituc, en théorie, comme une démocratie impérialiste.

Le mode de succession au klialifat n’est pas lixé parla loi. Il changea quatre fois à l’origine de l’islam. Mahomet n’avait pas désigné son successeur. Abou-Bekr fut proclamé par les principaux Musulmans, pendant qu’on ensevelissait le prophète. Ahou Bekr désigna son successeur qui fut Omar. Celui-ci remit l’élection du khalife après lui à un conseil composé de six membres qu’il désigna, en imposant cette clause que celui des six qui serait élu ferait périr les cinq autres ; mais l’un d’eux renonça au pouvoir, et les autres lui remirent le soin de nommer seul le khalife. Le régime de la succession (Ijnastique s’établit après Moavviah dans la famille des Omeyades. Le frère du khalife défunt ou son lils succédait ; le khalife pouvait aussi désigner un héritier présomptif <|ui était généralement un de ses lils. Le titre de Uiali/e fut pris par Abou Bekr ; le tilrede commandeur descroyants, émir al-momenin, fut porté du vivant du prophète par un de ses lieutenants, dans la deuxième année de l’hégire. 5H/<n « n’est point un nom religieux ; c’est un titre militaire qui fut porté d’abord par les princes Hamdanites, et par les Turcs Bouyides. Les sultans Osmanlis possèdent le khalifat, quoique n’étant pas Koréïehites. Il y a une sorte de fiction légale, d’après laquelle Sélini I", s’étant emparé de l’Egypte et des villes saintes, fut considéré comme l’héritier des droits des anciens khalifes.

Le pouvoir du khalife est absolu tant qu’il ne s’écarte pas de la loi ; s’il s’en écarte, il peut être déposé.

La loi est le Coran seul ; le droit en découle comme le dogme. La jurisprudence est dans l’islam une science religieuse.il n’y a pas de clergé au sens chrétien du mot ; rien qui cori-esponde au sacrement de l’ordre ; p.is de sacerdoce, pas de concile. On i>eut appeler conventionnellement clergé les docteurs, savants dans la sciencedu Livre et dans la tradition, les olliciers des mosquées, qui les gardent et y président aux prières publiques, et les juges

La loi et le dogme sont lixés par la tradition, siiniiali, et par le consentement unanime des docteurs, idjmù (accord). La tradition a une ini|>ortance considérable à coté du Coran ; elleest étudiée avec soin et avec une certaine critique. On attribue [dus ou moins de force à une tradition, selon que son premier auteur est plus ou moins ancien ou vénéré, et selon les personnes qui les ont transmises ; les traditions (liaJilli) sont rap[>ortées avec cette chaîne des intermédiaires, que l’on appelle les isiuid ou appuis. Il y a des traditions qui peuvent avoir presque la valeur des versets du Coran, car elles sont des fragments de la prédication de Mahomet, c|ui ne se sont pas trouvés joints au livre lors de sa recension. Aykiuïau a été à l’origine une grande autorité en matière de tradition ; on lui attribue un grand nombre de hadilh.Les premiers compagnons du prophète ou aiisàr sont aussi des autorités en lesquelles on a confiance. Les plus célèbres traditionnistes sont Imn Abu-A-s, au premier siècle, et plus tard Bokiiaui (édité par KuEHi., traduit par Houdas).

Quatre grands rites se sont formés dans l’islam orthodoxe. Us ont été fondés par quatre grands docteurs : Adou Hami’ah (m. 150 H. 767). Malik (m. I7() H. 795), CHAi-iii (m. 204 H. 819) et IisN Han-BAL (m. 2/(1 IL 858). Us s’accordent sur tous les points essentiels de la doctrine ; mais ils dilfèrent sur des détails de casuistique et sur quelques coutumes. La Turtjuie suit le rite Ilanclite ; l’Egypte est Chàféite ; l’.Vfrique du Nord, Malékite.

Les jurisconsultes et les employés des mosquées se forment dansles Universités (merfre^.ses) ; eellcs-ei

sont des sortes de grands séminaires, où l’on apprend surtout le Coran, lecommentaire et la tradition. Elles ont été fondées par la munificence des princes de l’islam, et enrichies des dons des croyants. L’université la plus célèbre du monde islamique est peut-être celle d’el-Azhar, au Caire ; il y en a d’autres qui sont très fréquentées à Samarcande, à Stamboul, etc. Le corps des docteurs ou l. lé ma s sortant des Universités a été organisé dans l’empire ottoman par des règlements de Soliman lk Maonhioue ; ces règlements ont établi les catégories et les classes qui forment ce qu’on appelle « la chaîne des Ulémas ». A leur tête est le clieïhh iil-istàiii, principal personnage religieux de l’empire après le khalife, dont Soliman a étendu les pou> oirs. Le cheikh iil-islàni a sous ses ordres quatre assesseurs qui s’occupent : des biens iiakouf, c’est-à-dire des fondations pieuses faites aux mosquées et aux écoles ; de la chancellerie ; des décisions juridiques ou fet<tah ; et des rapports avec le gouvernement. Parmi les docteurs qui s’occupent spécialement de droit, on dislingue les Mufti et les J(idis : les Kodis sont les juges, qui tranchent les différends ; les Mufti ne jugent pas ; ce sont des docteurs que l’on consulte sur les différents cas qui peuvent se présenter d’une façon théorique, et abstraction faite des personnes intéressées. Us répondent si telle chose est ou non conforme à la loi ; ces décisions juridiques s’appellent fet>ti, tous les Musulmans peuvent en demander. Des muftis sont placés dans toutes les villes de quelque inq>ortance ; le cheikh ulisldni est grand mufti de Conslantinople ; un fetna rendu par lui peut faire déposer le Sultan.

V. Mystique ; Confréries. — On peut distinguer deux sortes de mysti(jnes musulmanes : celle de l’école des a Philosophes ii, et celle des théologiens ou des ^’o » /^s. La première est néoplatonicienne ; la philosophie dite illuminative » en est une variété. La seconde est surtout d’origine chrétienne.

Il n’y a point de mystique propre au Coran. Mahomet et ses premiers disciples n’ont pas été, à proprement parler, des mystiques, mais simplement des hommes d’une foi vive, sensibles à deux ou trois idées religieuses fondamentales, l’unité et la puissance divines, la survivance de l’àmc, la rétribution dans l’au-delà. Ils étaient assez mal adaptés à la vie intérieure : c’était des guerriers.

La mystique a été introduite relativement taril dans l’islam ; elle s’est surajoutée à la loi coranique. La Syrie fut le centre où se formèrent les |>remiers mystiques de l’islam ; et à c^té d’elle. l’Egypte ; c’est-à-dire que l’ascétisme musulman prit naissance dans les territoires où avait lleuri la vie contemplative chrétienne.

Ces premiers religieux, parmi lesquels on compte des femmes, s’appelèrent ràhih, moines ou soufi^, de -sou/", laine, c’est-à-dire gens à la robe de bure ; soufi était le nom que l’on donnait aux moines chrétiens.

Les Musulmans n’avouent pas en général les emprunts qu’ils font au christianisme ; cependant leur littérature renferme à ce sujet quelques indications tout à fait explicites. Ainsi les histt)riens Mai, : oudi et Ai.iiiKOLM i>arlent des Evangiles ; dans le livre inviirif cl miutiif, de Suhrawerdi, qui est l’un des plus célèbres traités d’ascétisme chez les Musulmans, on trouve une véritable traduction de la parabole du semeur ; et dans les traités des Frères de la Pureté, on rencontre le récit de la vocation des.pôtres.

La doctrine des Soufis contient de nombreux traits i|ui ne sont qu’une reproduction de ce que l’on voit dans la mystique chrétienne ; la nécessité du directeur, l’obéissance qui lui est due, l’obligation de tout lui dire, son rôle conçu comme celui d’un