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IRAN (RELIGION DE L')

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Les six jours de la Genèse sont le type Je la semaine, les six actes des Persans ont lieu durant un an et sont le type des six fêtes de l’année. Il est d’abord tout à fait certain que ces six fêtes ne sont pas, à l’origine, des fêtes conimémoratives de la création., mais des fêtes des saisons'. On leur a donné arliliciellement ce caractère comméinoratif. Tout cela n’indique-t-il pas l’imitation de la Genèse ? Xous le croyons en effet, à cause de l’ensemble des faits rapprochés et surtout du nombre six. Car en soi l’ordre persan est assez naturel, moins compliqué que celui de la Genèse, et que des fêtes agricoles se transforment en fêtes conimémoratives, cela n’est pas sans exemple et peut se produire sans une imitation étrangère : par exemple la fête delà Penlecùte, qui dans l’A. T. n'étjiit pas encore rattachée au souvenir du Sinai. D’ailleurs l’Avesla ne connaît encore que le caractère agricole ou de saison des fêtes et l’ordre des actes créateurs n’y était pas absolument lixé. L’influence de la Bible, si elle a existé, ne se reneon.trerait donc qu'à une basse époque.

L’origine de l’homme chez les Perses se rattache à la coutume du Kàti’it : -das, l’inceste, glorifié par la religion ancienne, malgré les dénégations des Parsis modernes, qui ne seraient pas fâchés d’effacer cette institution de leurs annales. Ahura Mazda s’unit à la terre sa ûlle et engendre Gayomart. La semence de ce premier homme tombe après sa mort dans la terre sa mère, d’où le couple Alashya et Mashyàna, qui donnent naissance au genre humain. Le péché commence avec ce premier couple : ce dernier point suggère une imitation de Bible. Or, d’après Darmesteter, ce renseignement du Bundahish XV, 6 s.) remonte bien à l'.-Vvesta (Darm., IU, p. Lvn s.).

On a comparé le déluge avec l’arche de Xoé aux hivers que Yima prévient en construisant son vara. L’analogie est trop superficieUe et le thème de la destruction trop général pour qu’on puisse conclure.

Le partage de la terre entre trois personnes est plus caractéristique, d’autant que l’Avesta connaît cinq grandes races humaines : Airya. Sairima, Tura, Sàini et Dàhi (Yast, XIU, liS s.). Ce partage en trois serait avestique d’après Darmesteter III, Sgg, note 8).

Le même savant constate que seule la Perse possède comme la Bible une liste chronologique de ses souverains légendaires ; il faut reconnaître toutefois que le fond des légendes est parfaitement iranien.

>'ous ne comprenons pas comment l’illustre maître a pu citer aussi Abraham. Isaac et Jacob comme les prototypes des trois précurseurs de Zoroaslre dans le culte : Vivanhào. Ath-wya, Thrita, puisque, d’après lui. on retrouve ces mêmes noms dans l’Inde (Darm., U. p. 80).

Enlin nous ne voudrions pas conclure que l’idée même de la Révélation et des instructions données par Ahuramazda à Zoroastre soit une imitation du Penlateuque, malgré l’accord sur « la montagne des entretiens sacrés < (aussi : « la forêt des entretiens sacrés », bxdidad, XXII, 19). Tons les anciens législateurs étaient censés tnoir reçu leurs lois par

1. La mi-printemps a qui donnele lait » (Dabm., I, 4 ! 14) ; la mi-élé qui est la saison où se fait la feuaison ; la tête o qui donne le blé » I, p. 445) ; le 16 oct., la fête où la chnlear descend, « où son lâchés les m&les » : la fêle du mi-hiver, a où règne le froid » ; enfin. In fête des dix derniers jours de 1 année, en l’honneur des fravashis des ancêtres. Darmesteter a tort de nommer iiivthologique la conception rationnelle plus récente ; d’ailleurs tout le monde conclura avec lui ; « Il est naturel de penser que celle conception mythologique et cosmogoniqoe des fêtes annuelles est d’ordre secondaire : et en effet, leurs noms, leurs dates et leurs épithètes prouvent que ce sont avant tout des fêtes agricoles » (i, p. 38).

une révélation divine. Dans l’Avesta, Zoroastre questionne toujours ; ce qui ressemble plus aux oracles des Grecs qu'à la manière souveraine du Pentateuque.

Tout cela est assez peu signilicatif. Mais n’a-t-on pas exagéré encore plus en sens contraire ?

Je ne veux point poser la grave question de savoir si le chien de Tobie aurait eu l’honneur de figurer dans la Bible sans la vénération des Perses pour les chiens, ni si leur goût pour le cheval monté, non attelé, n’aurait pas influé sur les images dans Zacharie (cf. Stavb, /. L. p. lagss.). Tout est possible, et il importe assez peu.

Après ce que nous avons dit de la composition de l’Avesta, il est superflu de se demander si le canon juif est une imitation du canon persan ; le contraire parait trop assuré. On a supposé que l’usage de lire l’Ecriture dans les sj-nagogues venait des Perses : c’est tine conjecture en l’air, puisque rien ne -ient même suggérer que cet usage existât en Perse avant de se former en Judée.

On ne peut pas insister beaucoup non plus sur les hypostases. A supposer que la personnification des attributs divins, surtout la Sagesse, ne soit pas expliquée suffisamment par le simple développement de la doctrine révélée sans l’influence ou sans l’excitation due à une pensée étrangère, il serait plus naturel de recourir à la Grèce, comme à une source commune.

Aussi les critiqpies ont-ils concentré toute leur attention sur les anges et les démons et sur les lins dernières.

On insinue surtout que les Hébreux ont emprunté aux Perses, plus ou moins complètement, plus ou moins directement, la hiérarchie des esprits célestes et en particulier les anges gardiens des peuples.

D’après le livre de Tobie (Tobie, xii, 13. Sur les variations du texte, cf. Hackspii, l, L’Angélologie juwe à l'époque néo-testamentaire, RB., 190a, p. 534) il y a sept anges qui se tiennent en présence de Dieu. Stave les reconnaît déjà dans « les sept yeux sur la pierre * de Zacharie (ni, 9). Ne sont-ce pas les sept Ameshas Spentas ?

A cela il faut répondre une fois pour toutes que les.meshas Spentas sont constamment six et non sept. On rencontre, il est vrai, ce nombre de sept, mais dans un texte qui porte la trace d’un effort pour y atteindre ; car il ne peut être réalisé qu’en comptant parmi eux Ahura Mazda dont il est dit en même temps qu’il est leur père ("ïasht, Xlll, 83 ; répété Yasht, XIX, 16). La même allure embarrassée se retrouve dans la rédaction du Bundahish : « Et à la création, quand.hurmazd créa les sept Ainshaspands. étantlui-même le septième de ces excellents… » (Darm., II, p. 311.) Elt des Sémites avaient-ils besoin qu’on leur enseignât à se servir du nombre sept ? Aussi Béer a-t-il évolué et cherché le rapprochement précisément dans le fait que la tradition hébraïque, comme celle des Perses, oscillait entre le nombre sept et le nombre six ! Mais le nombre six chez les Juifs n’est attesté expressément nulle part '. Il est vrai que la tradition hébraïque a connu des noms propres d’anges plus nombreux que sept, mais

1. BeïB. Bas Buck Hfnoch dans Die Apocryphen de Kaulzsch, sur Hén., xx, 1-7. note dd. Les deux textes allégués pour le nombre six sont le texte éthiopien qui a laissé toaiher le nom du septième ange que nous avons maintenaat dans le grec, elle Targ. du Pseudo-Jonathan sur Dl., xxxiv, 6. Dans ce dernier passage on cite à ctMé de.Michel et de Gabriel quatre anges maîtres de sagesse comme ayant coopéré à l’enlerienient de Moïse. Parmi ces quatre est le métatron ! C’est donc une vue particulière ; il ne s’agit pas de six anges principaux.