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INSTRUCTION DE LA JEUNESSE

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Jésuites allaient jouer un rôle important. Le 22 février 1564 (Fou<jUEHAY, oin’r. cité. p. 305), s’ouvrait le Collège de Clermonl. « Le recteur même de l’Université, en leur accordant des lettres de scolarité, les plaça sous la protection universitaire. » (Théry, oavr. cité.)

L’heure était favorable ; le concile de Trente venait de se clore (iôG3). Très vite, le collège obtint un brillant succès (ibul.). Un nom y contribua dès la première heure, celui du P. Everard JMercurian, puis ceux des PP. MaldonatetVenegas (Fouqueray. p. ibj et 365). Le xvw siècle verra son plein épanouissement : sous la direction de maîtres tels que le P. Jacques Sirmond et le P. Pelau, il préparera « à la France la furie génération qu’on vit fleurir trente ou quarante ans plus lard, aux plus beaux jom-s du règne de Louis XIV » (Gh.DA.MEL, les Jésuites instituteurs de la jeunesse française, p. 18 ss.).

U reste à signaler les collèges des Bénédictins de Saint-Maur dits collèges de plein exercice. Ceux de Sorèze (Tarn), Ponllevoy et Vendôme (Loir-et-Cher) ont eu une véritable célébrité. Fameux aussi furent l’Académie des Bénédictins et leur plan d’études

(VaLLET de VlRIVILLK, OHIT. cité.p. 2^0 SS.).

4" Education des femmes. — L’éducation des femmes, selon une opinion assez courante, n’existait pas au moyen âge. Œs faits comme le suivant contredisent, au moins en partie, cette allégation. En i^ga, dans un village de Normandie, à la Haye-du-Theil (350 habitants), nous voyons « que les parens et amis de Marion Bouclier, qui vient de perdre son père, la baillent à sa mère et à son tuteur à garder, nourrir et gouverner pendant trois ans, pendant lequel temps ils seront obligés la tenir à l’école et lui traîner livres à ce nécessaires » (de Beairepaire, Recherches sur l’instruction puliliijue dans le diocèse de Rouen : Mémoires de la.Société des antiquaires de.Xormandie, t. XX et XXVI). La véritable situation parait être celle-ci : en France, au xv* et au xvF siècles, un très grand nombre de femmes sont notées pour leur instruction plus qu’ordinaire, mais la grande majorité des personnes de leur sexe restait dans l’ignorance (IloLssELOT, Hist. de l’éducat. des femmes en France, t. I, p. 18y).

L’instruction des femmes avait-elle du moins ses avocats’? Consultons nos deux moralistes. Rabelais

« ne paraît pas avoir une haute idée de la nature

féminine, ni se mettre en peine de l’éducation qui lui convient > (ibid., p. io5). Pour Montaigne, a-t-il « à s’exprimer sur le compte des femmes, c’est avec quelque sévérité, et il ne dissimule nullement qu’il les juge inférieures à l’homme » (ibid., p. loO). « L’instruction des femmes n’est pourtant pas tout à lait sans apologistes en France, au xvi* siècle, mais les apologistes sont fort rares. On enest réduit à leschercher parmi les écrivains de second ordre. » Témoin Jean Bouchet et l’Allemand Henri-Corneille Agrippa. Encore leur plaidoyer ne va-t-il pas sans de graves restrictions (ibid., y>. io8 s.). « Deux écrivains seulement, parmi ceux qui comptent, ont pris en main cette cause, mais deux écrivains dont on peut dire que la valeur supplée au nombre, Erasme et Vives. Luther aura son tour… » D’après Erasme et Vives, le latin et le grec conviennent aux femmes comme aux hommes (p. lai). Quant à Calvin, il jiarail moins préoccupé que Luther de l’instruction féminine

(p-’gg) La cause était gagnée, lorsque Fénelon écrivit son traité De l’éduciition des filles. Il s’y révèle le vrai maître de la pédagogie féminine au xvii" siècle : sous l’ignorance, un danger psychologique se cache ; l’éducation morale est inséparable de l’éducation intellectuelle ; aux femmes il convient d’apprendre

l’histoire, la littérature, même la philosophie ; on devra former aussi la maîtresse de maison (p. 38^ ss.). Passons aux faits. « L’instruction des tilles a été l’un des objets de la Renaissance religieuse et l’instruction des lilles pauvres l’une des formes de la charité eu acte. Les écoles séculières tenues dans quelques grandes villes et notamment à Paris étaient loin de sullire. Il n’y a qu’une voix, au commencement et dans le cours du xvii’siècle, sur l’abandon où était laissée « la moitié du genre humain ». Les bulles de Clément VIII, autorisant en France l’institut des Ursulines en 151j8, lui assignent pour but « de remédier à l’ignorance des enfants et du petit peuple, et à la corruption des mœurs » ; celles d’Urbain VIII, autorisant les Auguslines en 1628, déclarent expressément que « l’instruction publique des jeunes lilles n’avait pas encore été entreprise comme elle devait l’être… ». En 1666, M. Démia, ecclésiastique du diocèse de Lyon, adressait aux magistrats de la ville des Remontrances (Remontrances à MM. les Prévosts des marchands. Echevins et principaux habitants de latille de Lyon, dans la Me de M. Demia, p. 487) sur la nécessité d’instruire gratuitement les enfants pauvres de l’un et de l’autre sexe dont l’éducation est totalement négligée, quoiqu’elle soit la plus importante de l’Etat, puisqu’ils en fontle plus grand nombre », et il ajoutait : « Si la bonne instruction est nécessaire dans les pauvres garçons, elle ne l’est pas moins dans les pauvres filles… »

« Les congrégations enseignantes sont nées de

cette pensée ; leurs fondateurs ont voulu que l’école fCit la raison d’être des couvents nouvellement créés… la religieuse devait être avant tout institutrice. Dans la pratique, on dévia assez vite de la ligne initiale, mais tel était à l’origine l’esprit des communautés qui surgirent après la Réforme. » (Rousselot, p. 31^319.) Deux d’entre elles méritent une mention toute particulière : ce sont les Ursulines et les Augustines. CÉSAR DE Bus introduisit les premières en France en 15g2. Sous la direction de sa nièce, Cassandre, et de Françoise de Brémon, elles s’établirent d’abord à Avignon. Plus tard, au xviie siècle, elles eurent 320 maisons en France. A la date de 1657, le seul couvent de Saint-Denis avait déjà vu passer plus de 4.000 jeunes lilles des meilleures familles de Paris.

« Elles recevaient des pensionnaires, mais tenaient, 

en outre, des écoles publiques, où toutes les filles

« étaient admises gratuitement… » (Ihid., p. 31g-320 ; 

P. DuMAS, /.a vie du vénérable César de BHS, p.238 ss.)

Ce que César de Bus avait fait dans le Midi, saint Pierre Fourier l’accomplit dans l’Est. La congrégation des clianoinesses régulières de Saint-Augustin fit ses débuts à Mattaincourt en 1600. « Fourier leur enseignait à elles-mêmes une méthode de lecture,

d’orthographe et de calcul (RorssELOT, p. 321.)Les

Augustines eurent, comme les Ursulines, des internats payants et des externats gratuits (E. de Baze-LAiRB, Le bienheureux Pierre Fourier. p. 35-36, 62, 64 ; Rousselot, p. 320-321).

Quelques chiffres indiqueront le développement pris par les écoles congréganisles de filles. En l’jSg, la congrégation, peu connue d’ailleurs, des Filles de la Providence, dirige 116 maisons d’instruction, renfermant 1 1.660 élèves. A elles deux, celles des Ursulines et des Filles de Saint-Vincent de Paul possèdent alors plus de 800 maisons (Brunbtikhb, article’cité, p. 944-945).

5'> Tabtfliiii des congrégations enseignantes d’hommes et de femmes. — Cf. Vallet de Viriville, ouvr. cité, p. 245 (congrégations d’hommes et de femmes), Rousselot, t. I, p. 31g-323 (congrégations de femmes), etc.