Page:Adhémar d'Alès - Dictionnaire apologétique de la foi catholique, 1909, Tome 2.djvu/377

Cette page n’a pas encore été corrigée

741

INDULGENCES

742

dans Zeitschr., etc., XXIII (1899), p.’j49 ; cf.dumême : Johann Tetzel, p. 13j-ia3). En sorte que l’expression indulgence de ta cotilpe et di ; ta peine se trouvait pleinement jusliliée, à condition de l’entendre, non pas au sens propre et rigoureux du mot indulgence, mais au sens que lui donnait l’usage courant de rémission totale du péclié obtenue à l’occasion du jubile.

Ce n’est pas tout. Le jubilé ne permettait pas seulement de gagner une fois une indulgence plénière. A partir du xv’siècle, l’usage s’introduit d’accorder en outre, à cette occasion, la faculté de s’en faire appliquer après coup d’autres encore. Moyennant certaines conditions, on délivre alors ce qu’on appelle des lettres de confession ou d’indulgence : les <i confessionalia ». Elles permettent, entre autres choses, à celui qui les obtient : i » de se choisir un confesseur à son gré qui, une fois dans la vie, pourra l’absoudre même des cas réservés et lui appliquer une indulgence plénière ; 2" de se faire appliquer la même indulgence une fois encore au moment de la mort. Or, les indulgences à gagner ainsi portent également, et pour la raison indiquée tout à l’heure, le nom d’indulgences a cutpa et a poena.

Concluons : considéré avec tout ce qu’il comporte de facultés pour la rémission totale — coulpeet peine

— du péché, le jubilé s’est trouvé tout naturellement désigné par les mots « d’indulgence de la coulpe et de la peine n. Inexacte et équivoque en elle-même, cette appellation avait l’avantage d’énoncer brièvement l’ensemble des avantages attaches à cette concession pontificale, et c’est évidemment pourquoi le langage ordinaire l’a si universellement adoptée.

Restait à prévenir la fausse conception de l’Indulgence qui pourrait en résulter et que les historiens, obsédés par les formules mais étrangers aux réalités, crurent longtemps y reconnaître. Sur ce point, la lumière est faite, et force est désormais aux protestants eux-mêmes d’avouer que l’Eglise ne laissa jamais s’accréditer parmi le peuple la pensée que l’indulgence suffit par elle-même à prociu-erla rémission proprement dite du péché (cf. v. gr. Dieckhoff, J)er Ahtassstreit (Gotha, 1886) cité par N. Paulus, Johann Tetzet, p. loS-iog ; Brieger, art. cit., p. 87). Depuis le jour où cette formule à double sens fit son apparition jusqu’au moment où éclatèrent les protestations de Luther, canonistes, théologiens, prédicateurs ne se lassèrent pas de mettre les fidèles en garde contre cette erreur. Le D’Nicolas Paulus en a fourni la preuve péremptoire pour toutes les époques (cf. les articles de la Zeitsch. f. kath. Theol., cités à la bibliographie, surtout aux tomes XXIU (1899), p. 48 sqq., 428 sqq. ; ’ ; 43 sqq. ; XXlV(1900), p. 182 ; XXXVI, (1912), p. 67 sqq. et 1252 sqcj.). Pour le xvi’siècle, en |)articulier, il a montré que les bulles d’indulgence et les instructions à l’usage des prédicateurs et des confesseurs mentionnent régulièrement la contrition et la confession parmi les conditions préalables de toute indulgence à gagner par les vivants (Johann Telzel, p. 134, note 3 ; cf. p. io3, note 2). Tetzel lui-même a toujours très nettement affirmé cette doctrine (ibid., p. 97-98). Le texte seul d’une supplique qu’il proposait d’adresser au pape pour obtenir aux bienfaiteurs et aux visiteurs d’une église une indulgence a cutpa et a poena suffirait à montrer qu’il supposait la contrition et la confession comme devant nécessairement précéder la participation à cette faveur : « Supplicetur ut… plenissimarn omnium peccatorum suorum de quibus corde tere contriti et confessi fuerinl, pêne et culpe remissioucm et indul, 1 gentiam cunsequanlur « (ibid., p. 97, note 2).

Mais il nous plaît d’emprunter ici les constatations et les affirmations du protestant Brieger dans son

art. Indulgenzen. La a non sotum plena sed largior, imo plenissima omnium peccatorum venia » dont parle BoMFACK VIll(t’j//-(Jr. Comm., V, 9, i)ne doit s’entendre, dit-il, que de la rémission de la peine (p. 85, 1. 8-9). C’est ainsi du moins que l’entendait le cardinal Jean le Moine, un familier du pape, u Per islam indutgentiam, quæ vere poenitentibus et confessis conceditur, duplex injulgentia, culpæ s’ideticet et poenae, habelur » (ibid., 1. 16-18).

Puis il a toute une page (87) pour résumer les explications de la formule équivoque par les auteurs du XV’et du xvi" siècles. Ils en dénoncent le sens périlleux ; beaucoup protestent contre son emploi et nient qu’elle ait aucun caractère officiel et authentique ; mais tous surtout sont unanimes à exclure le sens d’une indulgence ayant pour objet propre et direct la coulpe même du péché. Celle-ci a dû d’abord être effacée, et c’est seulement à raison des facilités spéciales d’absolution annexées au jubilé que la remise de la peine a pu recevoir ce nom impropre :

« Valet… indutgentia ad remissionem poenae, 

non autem culpae, et ideo abusiia locutio est dicentium, quod hæc yet illa indutgentia remittit poenam et cutpam » (sermon du dominicain Pierre Jérémie de Palerme). « In forma indulgeiitiæ plenariæ communiter daiur facultas ut poenitens indulgentiam suscepturus possit etigere idoneum confessorem, qui absolvat eum ab omnibus peccatis, ita quod non oporteat eum recurrere ad curiam, si habet casum papalem… ita ut dicatur indutgentia a cutpa ratione facultatis datæ etigendo confessori absolvendi ab omnibus, etiam in casibus reservatis » (Joh. de Turrecremata, Commentaria super tractalu de poenit.^ Lyon, 1619, p. 40 A ces constatations de Brieger pourrait s’ajouter l’acte de foi aux indulgences prescrit par le concile de Constance aux disciples de Jean Hus ; il mentionne explicitement la contrition et la confession préliminaires, a Croyez-vous que le pape, pour un motif pieux et légitime, a le pouvoir d’accorder des indulgences pour la rémission des péchés aux fidèles qui se sont confessés d’un cœur contrit.^ » (Denzinger-Bannwart, 676 [670]). Mais en voilà assez sur ce point fondamental. Lea s’y est lourdement mépris, et ses pages sur l’indulgence a cutpa et a poena (54-80), si elles témoignent qu’il a beaucoup lii, attestent mieux encore qu’il a mal compris. Brieger, parce qu’il a dépassé les mots et a cherché à saisir le fonctionnement réel de l’institution, s’est rendu à 1 évidence : l’interprétation de la formule « indutgentia a cutpa et a poena « donnée par Bellarmin (De indulgentiis, I. I, p. vu) et Suarez (De pænit., Disp., r., sect. i, n. 1 et 2 ; disp. i, vi, sect. i, n. 15), n’a pas élé imaginée pour répondre aux attaques protestantes ; lEglisc n’a Jamais laissé se confondre la notion de lindulgence et la notion du sacrement de pénitence ; et c’est seulement pour s’être laissé guider par le i)arti pris de la trouver en faute quand même, au lieu de pousser jusqu’au bout l’analyse des faits, que lui-même, Brieger, a cru voir le sacrement de pénitence s’absorber dans l’indulgence (.irt. cité, -[>. 8890).

Les lettres d’indulgence ne sont pas une exception. Il est très exact que l’état de grâce n’était pas requis pour se les faire délivrer, et c’est en ce sens qu’on peut parler d’indulgence accordée pour tes péchés futurs ; mais la possession de la lettre d indulgence n’était pas l’indulgence elle-même ; elle donnait seulement le droit de se la faire appliquer le jour où l’on aurait d’abord obtenu l’absolution de ses fautes. Le texte même de la lettre le portait en propres termes : « Potestatem habet, lit-on dans relie dont Lea donne le fac-similé en appendice à la p. 70, potestatem habet eligendi sibi confessorem presbilerum