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Goha lui dit :

— La cheika, hein ?… La cheika…

La poitrine d’Amina se souleva. Elle s’effondra sur l’escalier en sanglotant. Appuyé sur la rampe, il la contemplait sans rien dire. Le chagrin de la jeune esclave le rendit heureux sans qu’il sût pourquoi et, quoiqu’il continuât à sourire, il crut qu’il pleurait lui aussi.

Il s’approcha d’elle, l’enlaça délicatement. Il était bien ainsi contre elle, pour songer à des choses qui n’étaient pas définies mais qui les concernaient l’un et l’autre.

— Ma sœur, dit-il.

Après une pause, il répéta :

— Ma sœur.

Elle ne répondit pas, mais elle aussi trouvait bonne cette étreinte fraternelle.

— Tu te rappelles ? reprit Goha… Son pied était petit, petit… Sa main était petite… Oh ! qu’elle était petite… et elle marchait comme ça.

Amina l’écoutait en hochant la tête et se serrait mieux contre lui.

— Sa robe était jaune, disait Goha… son âme était grise… Tous les jours je lui portais une cruche d’eau et une pastèque…

Amina lui avait pris la main et la caressait machinalement.

— La première fois, disait Goha, elle voulait me jeter dans la rue, Son front était dur, dur…

Il lui parlait bas et ses lèvres lui effleuraient l’oreille.

— Une autre fois, des anges tuaient les djinns