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LE LIVRE DE GOHA LE SIMPLE

Les femmes interpellent Nour-el-Eïn.

— Viens voir… le convoi passe.

— Allons à la fenêtre.

Des rumeurs se précisent. Il fait plus clair.

— Allons à la fenêtre… Viens voir…

Elle marche. À travers le grillage de la moucharabieh, elle entrevoit la rue qui fourmille de centaines d’êtres agités. Des lueurs rougissent la foule et les murs. C’est le soleil couchant, mais Nour-el-Eïn est éblouie. Les hommes crient, les femmes crient et Nour-el-Eïn, qui n’est pas encore en communication immédiate avec la vie, croit que la lumière s’interpose entre elle et les clameurs.

— Il n’est d’autre Dieu que Dieu et Mohamed est l’envoyé de Dieu.

— Voici les aveugles et les mendiants, dit Mirmah.

— Ah !… pauvre ! Ô toi qui portais de jolis souliers et de jolis vêtements, dit Amina.

— Ah !… qui les portera tes jolis souliers ?

— Voici le cercueil.

— Cheik-el-Zaki… Il aide à porter le cercueil.

— Je vois, deux jeunes gens au visage voilé. Ce sont les amis du défunt. Comme ils ont l’air triste et comme ils ont une belle taille !

— L’un s’appelle Mokawa Kendi, l’autre s’appelle Akr-Zeid-Taï.

— Oh ! combien de pleureuses !… Et leurs cheveux, regarde comme ils sont couverts de cendre.

— Nour-el-Eïn est sans pensée. Cependant, lentement, la foule bariolée captive son attention. La terreur passe. Elle assiste avec curiosité au spec-