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LE LIVRE DE GOHA LE SIMPLE

— La ! La ! Je revois ta mère… La ! La ! Danse, ma gazelle… La ! La ! Fille de Mélek… La ! La ! Je revois ta mère…

Lorsque Nour-el-Eïn s’assit haletante, la vieille la caressa d’un geste attendri.

— Tu es légère comme une feuille desséchée, dit-elle.

Voyant un pli entre les sourcils de sa dame, elle la menaça du doigt et s’esquiva après lui avoir glissé à l’oreille :

— Ta mère a bu mon lait… et toi, tu me caches un secret !

« Elle sait donc »… se dit Nour-el-Eïn. Cette découverte lui donna le sentiment qu’elle se trouvait aux prises avec des forces fatales et qu’elle devait en subir docilement la loi.

— Je connais son nom, annonça la dallala lorsqu’elle revint voir Nour-el-Eïn.

— Le nom de qui ?

— Tu as si vite oublié ? s’indigna Warda. Et moi qui ai fait le tour de la ville… J’ai usé une paire de babouches pour apprendre… ce que j’ai appris.

— Je te la paierai, Warda.

— Non… Puisque tu as oublié, je ne te dirai rien et, toi, tu garderas ton argent…

Nour-el-Eïn lui demanda si sa santé était bonne. Inquiète, quoique flairant une ruse, la dallala, reprit :

— Je connais son nom et sa maison… Mais tout cela ne t’intéresse pas.

— Et tes affaires vont bien ? continua Nour-el-