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MESSES NOIRES

— Ne dites pas ça. Vous espérez le contraire. Mais calmez-vous. J’ai répondu en normand. Chi lo sa, mon Prince ? Essayez toujours.

— À merveille… Et il va essayer ?

— Parbleu ! Je suis chargé de vous inviter pour ce soir, il organise une sérénade en votre honneur. Il court les calles et les traghetti comme un dératé pour trouver de jolies filles et de bons chanteurs. Parce que, m’a-t-il susurré, avec de jolies filles et de bons chanteurs, ça l’excitera.

— Délicieux. Mais si je refuse, d’Alsace, qu’est-ce qu’il dira votre vieux ?

— Il ira planter sa tente ailleurs…

— Il a donc des neveux partout ?

— Jeune Choléra ! Allons, venez-vous ? C’est à 6 heures. Rendez-vous au café Quadri. Il n’y aura que d’Herserange comme exportation.

— Ah bah, lui aussi ?

— Oh, vous savez, il n’est pas bien à craindre. Une tête de grenouille et une âme de caniche. C’est le Sabbat de la princesse.

Andiamo, alors, convenu ! Avertissez le Skotieff. Je vais me soigner pour ce soir. Ces Russes aiment le piment. Je vous promets d’en bien servir.

Et comme d’Alsace sortait, un bruit de voix surprises et amusées retentit dans le corridor de l’hôtel. D’Alsace reparut, suivi d’Herserange.

— Quand je vous en parlais de notre diplomate ? Le voici, monseigneur. Je vous le laisse jusqu’à sa minorité, prenez-y garde.

Dans un rire, le dernier rayon du soleil nimbait d’or la chevelure du jeune homme, dans un rire, Lyllian vit