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LORD LYLLIAN

Puis, ayant examiné :

— Qui est-ce ça ?… dit-il en désignant d’Alsace. Je connais l’homme…

— Jean d’Alsace, dit la Fistule du Sébasto. Ah, lord Lyllian, vous m’étonnez !

— Je vous étonne ? Pourquoi ? Parce que je n’ai pas couché avec lui ? Dites-le tout de suite, parole !…

Et, d’un bond, sans se dévêtir de son manteau, l’adolescent atteignit l’écrivain.

— Je suis lord Lyllian, monsieur d’Alsace. Charmé de vous voir… Nous sommes d’anciennes connaissances… Vous rappelez-vous, en Grèce ? D’ailleurs je vous ai vu et lu… Au moins, vous êtes pourri et vous le dites très élégamment… Je vous adore !

— Moi, pas encore, Monsieur, dit d’Alsace, picote ; mais ça viendra peut-être. Quel sombre costume avez-vous choisi ?…

— Vous parlez sans savoir, by Jove ! Très commode au contraire, très commode pour danser, pour pleurer, pour rire et pour aimer. Et, se tournant vers le maître de maison : Donnez-moi quelque chose to drink, voulez-vous… que je sois nerveux ce soir !

Della Robbia tendit au jeune lord du champagne et une fiole rose.

— C’est excellent, Lyllian, je vous le recommande.

Lord Lyllian fit sauter le bouchon, versa dans sa coupe le contenu entier.

— Ça va être un tremblement de terre, acquiesça M. d’Herserange hypnotisé.

Mais lord Lyllian n’y prit point garde. Comme il avait les deux mains prises, l’étoffe s’était écartée et Feanès ne put retenir une exclamation sourde…