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MESSES NOIRES

allée en quinconces où, par endroits, des statues de marbre dressaient leur fantôme mélancolique et désuet, le pavillon apparaissait tout blanc dans cette verdure.

Déjà, des robes claires de jeunes filles, des éclats de rire d’enfants émaillaient les pelouses, sonnaient gaiement parmi les fleurs. Lord Lyllian, intimidé contre son habitude, saluait d’un mot ou d’un regard, au hasard des rencontres. Son cœur battait. Il se sentait très pâle et comme angoissé. Soudain, il l’aperçut au milieu d’un groupe charmant. Elle… oh rien qu’elle… il l’aperçut. Tremblant, pris d’une émotion indicible, il n’osait pas ; il n’osait plus.

À ce moment, quelqu’un lui frappa joyeusement sur l’épaule.

Don’t you know me anymore, Lyllian ? Voilà ce que c’est que d’être amoureux… ajoutait plus bas Lionel Fantham, secrétaire de l’Ambassade d’Angleterre, oncle de la jeune fille. Allons, reprit-il, venez dans un petit coin du parc causer avec moi. Oh, pas bien longtemps, une minute ! C’est une promesse que j’ai faite, une gageure que j’ai tenue ; après je vous renverrai à vos rêves, monsieur le Songe-Creux.

Il souriait en parlant, d’une façon très malicieuse et si encourageante toutefois, que Renold ne savait que répondre.

En se dirigeant, suivi de Lionel, vers une allée déserte, Lyllian croisa lady Hogarth avec la mère de sa tendre amie. Et là encore, par les paroles très affectueuses dont on le complimenta, il crut saisir comme l’aubaine d’un grand bonheur.

— Vous savez que mon petit doigt m’apprend bien