Page:Adam - Mes premières armes littéraires et politiques.djvu/92

Cette page a été validée par deux contributeurs.

droit de défendre contre Proudhon la jeunesse de George Sand et de Daniel Stern, ni leur situation aujourd’hui. Vous les exposeriez au ridicule, et elles vous en voudraient mortellement, car Proudhon, à n’en pas douter, vous répondra. »

Le désespoir me prit, et M. Fauvety, auquel je racontai mes démarches, ne me consola guère en me disant :

« Nous vivons à une époque de lâcheté générale.

— Ce n’est pas par lâcheté qu’on m’éconduit, répliquai-je, c’est par mépris de ce que j’ai pu faire, puisqu’on refuse même de me lire, les uns, parce qu’ils me trouvent jolie, les autres, parce qu’ils me croient laide ! »

Je n’ai pas oublié ces jours-là. Tout était pour moi douloureux. Je n’avais eu le courage de subir ma vie intime que dans l’espoir de me faire une vie littéraire. Or, cette dernière me fuyait, non par ma faute, mais par malchance.

J’avais laissé ma fillette à mes parents pour être plus libre de faire mes démarches, et je songeai à la rejoindre, à me retirer auprès des miens. Je parlai de séparation amiable à mon mari.

« Jamais je ne me séparerai de vous, me dit-il, vous êtes le plus bel ornement de ma maison, et, si j’étais dans l’embarras, les vôtres me sauveraient, j’en suis certain ; qu’il ne soit plus question entre nous de cette fantaisie, elle