Page:Adam - Irène et les eunuques, 1907.djvu/97

Cette page a été validée par deux contributeurs.
81
IRÈNE ET LES EUNUQUES

joues tremblaient. Ses doigts saccageaient sa barbe rare. Tels ceux qui veulent s’étourdir, il parlait avec précipitation. Il voulut lui démontrer que les Sciences seules assurent la naissance de l’Extase, qu’elles préparent la route vers le Bythos divin. Il leur souvint qu’elle le pensait aussi jadis. Elle le confessa. D’ailleurs toutes les idées sont en le Théos. Elles préexistent avec lui. Et si, conformément à l’avis de Denys l’Aréopagite, l’imagination intuitive l’emporte sur le raisonnement déductif, il n’en est pas moins véritable que l’imagination construit exclusivement ses rêves sur les assises de la Connaissance. Les gnostiques ont écrit assez là-dessus. Aussi bien Proclus lui-même a déclaré que le Pontife de l’Univers ne peut être que le philosophe. Or, qui se peut dire philosophe s’il demeure ignorant de la nature, de ses lois, de ses phénomènes et de ses noumènes. Donc Proclus se trompe en sa conclusion. Mais l’Aréopagite élucide le problème. Jean s’exaltait, sûr de sa logique, de ses victorieuses citations :

— Et moi, disciple de ces grands esprits, qu’ai-je souhaité, Irène, Maîtresse des Romains, sinon créer le Pontife de l’Univers en ton corps. Et voilà. Il en est ainsi. Tu sièges sur le trône de l’Univers déjà. Il t’appartient d’être philosophe pour en devenir la Pontife. Mais tu as oublié la doctrine pendant que tu gagnais la couronne en sacrifiant Léon sur l’autel païen de ta couche. Car telle fut seulement ton œuvre dans notre œuvre, celle de Théophane, le chambellan,