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tistes délicats, recherchés, subtils, n’y avait-il pas là une originalité et un intérêt ? N’était-ce pas une aventure digne d’être risquée, et si tous ces hommes d’argent se précipitaient vers moi, la bataille n’était-elle pas gagnée ? Je voyais bien, parmi eux, le roi de l’acier, le roi du cuivre, le roi du fer, mais qui donc était le roi du rêve ? Eh bien ! je ne peux pas affirmer que tous les grands « businessmen » soient accourus m’entendre, mais beaucoup, en tout cas. N’est-il pas expressif, d’ailleurs, ce regret énoncé par l’un d’eux, au dîner d’adieu du Players-Club, que l’heure de mes conférences eût été aussi celle où le « business » atteint son summum d’intensité, ce qui les avait empêchés de s’y rendre aussi assidûment qu’ils l’auraient voulu ? »

Un secrétaire apporta une carte. M. de Montesquiou s’éloigna quelques minutes en s’excusant, puis, revenu, reprit sa place, son attitude et continua :

« J’avais annoncé que je serais absent trois mois et j’ai été absent trois mois : je tiens à ce qu’on le remarque. J’étais parti sur La Savoie. À peine en vue de New-York, je fus la proie des journalistes ; le bateau-pilote qui accostait le paquebot en amenait déjà, qui envahissaient le pont, interrogeaient les passagers sur ma vie à bord durant la traversée, puis, me découvrant, me demandaient tout de suite ce que je pensais de l’Amérique. Je devais à mon prestige d’élégance de descendre dans un lieu brillant, avec excès de lumières, de