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PARTENZA…

Baptistère ; la Loggia del Bigallo, timide, petite et si fière quand même, devant ces trois merveilles.

Cet appareillage est rude et massif, mais en même temps délicieux aussi ; il reste dans la frivolité de ces marbres finement assemblés sur la Campanile toute la jeunesse et la beauté de Giotto le pâtre… Un gamin vient de passer, il avait une jolie tête ronde perdue dans les boucles noires, légères et folles de sa chevelure ; ses grands yeux expressifs étaient remplis d’une grave et tendre sérénité et d’une sorte de recueillement que rendaient plus calme encore, plus étrange sur un si frêle visage, des paupières bordées de longs cils qui, tombant avec lenteur sur les yeux, répandaient sur les lignes pures de ses joues de grandes ombres violettes, fraîches comme les buées de l’aube à peine éveillée ; ses lèvres étaient extrêmement fines, rouges et mouillées ; le menton s’enfuyait sous elles dans un sourire, spirituel comme un trait d’esprit permanent, et pourtant on eût dit qu’il achevait le profil prématurément grave d’un César adolescent… Je l’ai remarqué, ce jeune homme, là, devant le Baptistère ; et le rapprochement s’est fait tout seul en moi, entre Giotto et lui ; et j’ai bien regardé cette jeune figure délicate et pensive, en songeant que, sans doute, sous un front pareil, puisque Giotto avait aussi la beauté surprenante d’un jeune dieu, s’agitait en celui-ci le chaos magnifique des porphyres et des marbres qu’il devait lancer en plein ciel de Florence, en plein azur, dans la vibrante et lumineuse atmosphère qui l’enivrait en montant de la ville jusqu’à lui, quand, sur les montagnes voisines,