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même à ses pieds. Belle-Rose souriait à la mère et à l’enfant, oubliait tout un instant, et revenait bien vite à son idée fixe aussitôt qu’il était seul. Cependant le printemps de 1672 fleurissait. La France était puissante et prospère au dedans, crainte et respectée au dehors. Son influence dominait en Europe. Elle avait l’autorité du génie et la prépondérance des armes. Si un instant, vers le commencement de 1668, elle avait été contrainte de reculer devant la quadruple alliance de l’Espagne, de la Hollande, de l’Angleterre et de la Suède, et de consentir au traité d’Aix-la-Chapelle, arrêtée au cœur de ses conquêtes par cette ligue formidable, elle avait conçu l’espérance et le pressentiment de ses victoires à venir. Louis XIV n’avait rien oublié. Au milieu des magnificences de son règne et la pompe d’une cour qui était sans rivale dans l’univers, il se souvenait de cette mortelle injure que lui avait faite Van Benning, échevin d’Amsterdam, alors qu’il était, en quelque sorte, venu lui signifier de ne pas aller plus loin. Tandis qu’un peuple de gentilshommes emplissait les galeries de Versailles et de Saint-Germain, les gazetiers de la Hollande n’épargnaient au jeune roi ni le dédain, ni le sarcasme. Des médailles outrageantes avaient été frappées, et on prétendait que sur l’une d’elles Van Benning s’était fait représenter avec un soleil et cette devise en exergue : In conspectu meo stetit sol. Louis XIV attendait. Il savait que son heure était proche, et il voulait une vengeance éclatante. De 1668 à 1672, les années s’écoulèrent en préparatifs. L’Europe étonnée et la Hollande inquiète surveillaient ces apprêts. On sentait la guerre dans l’air, et l’on ne savait pas où la guerre éclaterait. La marine, augmentée par le grand Colbert, s’était exercée dans les guerres lointaines de Candie et d’Alger, et dans des colonisations plus lointaines encore, le drapeau de la France flottait sur toutes les mers. Les amiraux étaient Tourville, Duquesne, d’Estrées ; les chefs d’escadre : Jean