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GORGEON.\t255 ■ | cassette, qu’il était un fils de famille. Lorsqu’il sor¬ tait du théâtre, le 3 du mois, avec ses appointements dans sa poche, il se disait : « J’ai un bonhomme de père, un Gorgeon laborieux, studieux et vertueux, qui m’a gagné quelques écus sur les planches du Palais-Royal : à moi de les faire rouler ! » Les écus roulèrent si bien, que l’année 1849 le sur¬ prit au milieu d’un petit peuple de créanciers : il devait vingt mille francs, et il s’en étonnait un peu. « Com¬ ment! disait-il, à l’époque où je ne gagnais rien, je ne devais rien à personne ! Plus je gagne, plus je dois. Est-ce que les gros appointements auraient la vertu d’endetter leur homme ? » Ses créanciers venaient le voir tous les jours , et il regrettait sincèrement de déranger tant de monde. Il n’est pas vrai que les artistes se complaisent dans les dettes comme les poissons dans Veau. Ils sont sen¬ sibles, comme tous les autres hommes, à l’ennui d’é¬ viter certaines rues, de tressaillir au coup de son¬ nette, et de lire des hiéroglyphes sur papier timbré. Gorgeon regretta plus d’une fois le temps de ses dé¬ buts, ce temps , cet heureux temps où l’épicier et la laitière refusaient tout crédit à Orosmane. Un jour qu’il méditait tristement sur les embarras qu apporte la richesse, il s’écria : * Heureux celui qui n’a que le nécessaire ! Si je gagnais tout juste ce qui suffit à mes besoins, je ne ferais pas de folies, donc pas de dettes, et je pourrais circuler librement