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Tous les hommes veulent avoir ; c’est une ambition non-seulement naturelle, mais louable.

« Pour avoir, il faut hériter, ou travailler, ou gagner à la loterie. » (Cernuschi.)

J’écarte la loterie, qui est une impudente exploitation de l’imbécillité humaine, et je dis : ceux qui n’ont pas eu le bonheur d’hériter ne doivent rien attendre que de leur propre travail et de leur épargne personnelle. Toutes les théories qui leur promettent des biens gagnés autrement sont des leurres.

Consommer tous les jours un peu moins qu’on n’a produit, voilà la source unique de tous les capitaux, petits et grands.

J’avoue que le fait d’entasser sou sur sou n’est pas très-séduisant en lui-même. Cependant cette pratique a pour effet certain de rendre le travail plus intéressant et moins dur. Ceux qui vivent au jour le jour, absorbant tout leur salaire à mesure qu’ils le gagnent, n’ont aucun encouragement ici-bas. Leur vie est sans objet ; le passé, le présent, l’avenir se ressemblent ; ils sentent que dans vingt ans ils ne seront pas plus avancés qu’aujourd’hui. Cela étant, pourquoi se donner de la peine ?

Dès que le prolétaire a commencé le petit pécule qui doit, ou émanciper son travail, ou assurer le repos de ses vieux jours, tout change de face. Il