Page:About - ABC du travailleur, 1868.djvu/297

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

s’ingérant dans le commerce. Ils n’ont ni l’aptitude, ni l’argent nécessaire aux opérations de vente et d’achat, et ils risquent d’autant plus d’y perdre leur première mise, qu’ils feront le négoce par ministère d’intendant.

Ces considérations ont décidé quelques groupes de travailleurs intelligents à transiger avec le commerce au lieu de lui déclarer la guerre. A Mulhouse, à Strasbourg et dans plusieurs autres villes d’industrie, le prolétaire renonce à créer des magasins spéciaux. Il s’entend à l’amiable avec les détaillants établis et stipule une remise de 5, 6 et 7 pour 100 sur toutes les fournitures. Il achète au comptant, paye les objets de consommation au prix de tout le monde, et laisse le produit des escomptes se capitaliser dans une caisse commune. Ce n’est pas précisément de la coopération, mais c’est de l’épargne fort bien entendue. M. Émile Kœchlin a calculé que ces petits escomptes, ajoutés à une très-faible cotisation, produisaient au minimum 36 fr. par tête et par an, et que chaque sociétaire par l’accumulation des intérêts de ses 36 fr. annuels amasserait 452 fr. en dix ans, 1190 fr. en vingt ans, et 2400 fr. en trente ans. Voilà une modeste combinaison qui permet au prolétaire de créer un petit capital sans risquer un centime et sans se priver de rien.