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gne au petit capitaliste ; il la pratique d’instinct, et il l’enseigne à ses enfants par son exemple.

Il serait donc à souhaiter, dans l’intérêt du genre humain, que la répartition des richesses fût moins inégale, et que tout individu en âge de travailler rencontrât pour ainsi dire sous sa main l’instrument d’un travail utile. Les hommes de bonne volonté s’accordent tous à dire que le monde irait mieux s’il en était ainsi.

Mais souhaiter et obtenir sont deux : voici l’obstacle :

Le droit de propriété est absolu. Quand le pécheur s’est tenu toute une journée au bord d’une rivière pour prendre une demi-douzaine de poissons, sa pêche lui appartient aussi incontestablement que sa tête, son bras ou sa jambe. Il s’est fatigué, c’est-à-dire qu’il a dépensé une partie de sa personne en échange de ces poissons ; il a seul le droit de s’en nourrir pour réparer ses forces : le produit de son travail vient de lui seul et ne doit retourner qu’à lui. Le soir venu, si ce brave homme est assez sage pour penser au lendemain, assez sobre pour rester sur sa faim, s’il ne mange que cinq poissons sur six et qu’il garde le sixième, il est évidemment dans son droit : le poisson qu’il a épargné lui appartiendra demain aussi absolument qu’aujourd’hui. S’il aime mieux le vendre deux