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Le commis de magasin vend ses services au patron moyennant un salaire de tant par mois. Il sait que s’il était établi à son compte il tirerait probablement un meilleur parti de son intelligence et de son activité ; que peut-être il gagnerait deux fois, dix fois, vingt fois davantage. Mais d’abord il n’a pas les capitaux ou le crédit indispensables pour fonder le plus modeste établissement. Ensuite, il voit de près les difficultés, les risques, les dangers du commerce, et il s’estime heureux d’esquiver toute initiative et toute responsabilité. Que l’inventaire de fin d’année soit bon ou mauvais, il a touché son salaire mensuel. Que le patron tombe en faillite, il s’en lave les mains.

L’ouvrier de manufacture ne gagne pas autant que son patron, ni même que le plus modeste artisan en boutique ; mais il n’apporte aucune mise de fonds, il n’expose rien ; lorsqu’il a terminé sa pièce ou fini sa journée, il sait qu’il a gagné quatre ou cinq francs ou davantage ; il va dîner et dormir sans souci. Peut-être cependant le produit de son travail sera vendu à perte ou dédaigné par la consommation, c’est-à-dire enterré, matière première, main-d’œuvre et tout. Tant pis pour le patron ! L’ouvrier n’entre pas dans ces détails. Il a livré son travail, touché sa paye : il n’a plus rien à prétendre sur les produits éven-