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son labeur annuel. Cette somme est décidément à lui ; elle ne doit plus rien à personne ; il en est le seul maître et le vrai propriétaire ; il a le droit d’en user et d’en abuser, c’est-à-dire de la consommer jusqu’à extinction, si bon lui semble.

Mon autre voisin est un grand industriel qui vend du fer travaillé en cent façons pour plusieurs millions chaque année. Il récolte, au lieu de blé, des limes, des outils, des ressorts de crinoline, des ouvrages plus ou moins ingénieux, plus ou moins utiles, mais tous généralement demandés sur le marché européen. Au fur et à mesure de la vente, il encaisse une forte somme, quatre millions au moins, payés par une centaine de gros marchands. Mais lui-même est débiteur de plusieurs millions, pour salaires. Le capital, ou l’immense outil qu’il met en œuvre, appartient à deux cents personnes qui le lui prêtent : il faut payer salaire à ces gens-là. Les cinq ou six cents hommes qui forgent, taillent, liment, ajustent et polissent dans ses divers ateliers, ne sont pas des esclaves astreints au travail ; ils viennent à la fabrique parce qu’ils le veulent bien ; chacun d’eux a fait ses conditions à l’avance et stipulé son salaire. Quand tout le monde aura reçu ce qu’on lui doit, le chef d’usine fera son inventaire et dira : Tous comptes faits, mon salaire, à moi, est de tant. L’an dernier, c’était