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Le difficile, hélas ! est d’évaluer l’un par l’autre ces deux biens privilégiés qui évaluent tous les autres.

Dans les pays où l’argent est adopté comme étalon, c’est-à-dire comme unique mesure des valeurs, l’argent évalue tout, achète tout : le blé, le drap, le vin, l’or même y sont cotés comme marchandises. Tout cela hausse et baisse au gré de l’offre et de la demande ; on en donne plus ou moins en échange d’un gramme d’argent. L’argent seul est solide au poste ; il représente l’unité fixe, invariable, à laquelle on rapporte les valeurs de toute espèce. Si je conclus un marché à long terme, si par exemple je prête à une société civile ou à une association religieuse cent kilogrammes d’argent moyennant une rente perpétuelle de cinq pour cent, je suis sûr que ma postérité la plus reculée recevra tous les ans cinq kilos du même métal. Ce contrat, comme tous les contrats du monde, laisse prise au hasard des événements, il implique une part d’inconnu. Je ne peux pas prévoir si dans deux ou trois siècles les aliments, les habits, la vaisselle, les objets de première nécessité, les marchandises de luxe coûteront plus ou moins cher que de mon temps. Peut-être obtiendra-t-on pour un gramme d’argent quatre fois plus de pain qu’on n’en achète aujourd’hui : peut-