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perdu pour les trois quarts. Le poisson n’attend pas longtemps en magasin ; il faut le manger tout de suite, ou le voir pourrir. Grâce à la salaison, il peut durer trois mois, six mois, toute une année.

Mais refuserons-nous un mot d’éloge au premier pêcheur qui s’est dit : « Ma pêche est trop belle, impossible de la manger à moi seul. Il est vrai que je peux en troquer le surplus avec les bonnes gens du voisinage qui ont envie de poisson. L’un me donnera des légumes, l’autre du lard, l’autre du drap, l’autre du pain ; mais que de provisions j’aurais là sur la planche ! Comment en venir à bout par moi-même ? Faudra-t-il les échanger de nouveau ? C’est le diable. Les laisserai-je perdre ? Autant laisser pourrir mon poisson tout de suite. Une idée ! Si j’échangeais tout cela contre un petit lingot d’argent ou d’or qui valût à lui seul mes dix mille harengs ! Le métal ne pourrira pas, je le garde pour l’échanger miette à miette, tantôt contre une sole, tantôt contre un homard, quand je serai trop vieux pour aller moi-même à la pêche ! » Le premier qui raisonna ainsi n’était pas sot, avouez-le ; il avait trouvé la méthode de saler son hareng sans sel.

Lorsqu’une expérience de plusieurs siècles eut fait voir que les mérites de l’or et de l’argent n’é-