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échangé contre des biens et des services de toute sorte.

Cette conversation releva l’argent dans mon estime ; elle m’apprit à considérer le vil métal comme un des produits les plus intéressants de l’énergie humaine.

Quelques années plus tard, je rencontrai (toujours en France) un brave homme qui s’adonnait à la production de l’or. C’était un Alsacien, un de ces orpailleurs du Rhin, qui cherchent le métal dans le gravier du fleuve. Sa profession consistait à laver sous le courant quelques kilogrammes de sable choisis aux bons endroits, pour en trier les paillettes. C’est un rude travail, et, de plus, passablement ingrat : on y récolte surtout des rhumatismes. Non que les paillettes soient rares : dans chaque mètre cube de graviers moyens, vous en trouvez environ 40 000, mais si légères que le fleuve en apporte beaucoup de la Suisse jusqu’à Strasbourg, à travers le lac de Constance, sans les laisser tomber en chemin. Il faut 17 000 à 22 000 de ces molécules pour faire un gramme d’or, du prix de 3 francs environ. Mon orpailleur récoltait en moyenne 1 fr. 75 par journée : il a donné sa démission pour travailler aux champs, ce qui lui vaut dix sous de plus. L’or est donc un produit qui peut coûter plus qu’il ne vaut.