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coupelle étaient prêts à entrer dans la circulation.

Vous rappelez-vous la tirade de Robinson Crusoé, lorsqu’en fouillant l’inépuisable navire il met la main sur le magot du commandant ? « Te voilà donc, vil métal qui… vil métal que !… » Hé bien, s’il faut vous l’avouer, mon impression fut tout autre. Ces malheureux lingots, qui avaient coûté tant de peine à des hommes, mes semblables, me frappèrent d’un certain respect. L’argent m’apparut, pour la première fois, comme un produit laborieusement arraché à la terre. Je passai en revue toutes les professions qui le procurent aux hommes, et je n’en vis pas une aussi rude que celle de ces mineurs. « Somme toute, me dis-je, l’argent est plus facile à gagner qu’à produire : voilà des lingots qui coûtent cher. »

Comme j’avais pensé tout haut, l’ingénieur me répondit : « Ils coûtent si cher que, très-probablement, nous n’en ferons plus l’année prochaine. Le plomb même, qui fournit le plus clair de notre revenu, couvre à peine les frais d’exploitation. On parle d’abandonner la mine, c’est un malheur pour tous ces braves gens qui y gagnent leur vie tant bien que mal.

— Abandonner une mine qui produit de l’argent ! Est-ce possible ?